Démanteler l’échangeur et préserver l’avenir

La conseil municipal du 21 décembre a examiné une délibération sur une étude préliminaire à la transformation de la porte de Bagnolet. Edith Félix, maire adjointe chargée notamment de la voirie et des mobilités, a insisté  sur la nécessité de penser d’abord un projet d’infrastructure routière.  Elle a rappelé les réserves des écologistes sur l’enfouissement qui ne résout aucun problème…

Cette délibération porte sur une mission d’Assistance à Maîtrise d’Ouvrage pour une étude préliminaire à la transformation de la porte de Bagnolet. La nécessité de cette transformation justifie bien que l’on procède au plus vite à des études approfondies pour dégager les meilleures solutions, donc on peut dire qu’il n’y a pas d’obstacle à voter pour cette délibération. La prestation d’études est financée par des partenaires extérieurs à la ville, la ville de Paris, Est Ensemble, la Métropole du Grand Paris dont on peut remercier le nouvel engagement de réparer la coupure urbaine imposé par l’État lors de la construction de la A3, et les dommages infligés sur la santé des riverains occasionnés par une telle infrastructure.

Regardons pourtant l’enjeu. Nous sommes devant une infrastructure monumentale, dont on dit qu’elle est le plus gros échangeur autoroutier d’Europe. Il s’agit d’un enjeu d’aménagement urbain, bien sûr, mais pas seulement : c’est encore plus un enjeu de circulation, de mobilités, avec un trafic de 300.000 véhicules/ jour dont 85% est un trafic de transit imposé entre la A3 et le boulevard périphérique.

« La perspective d’une baisse de trafic significative sur l’A3 n’est pas envisageable pour l’Etat » nous dit-on. Pourtant c’est bien le premier point à travailler au moment où la ville de Paris a décidé d’abaisser la vitesse maximale sur le périphérique à 50 km/heure. La transformation de l’A3 en boulevard urbain est bien la perspective qu’il faut envisager pour ce projet qui se situe sur le long terme, à trente ans.

Il faut d’abord penser un projet d’infrastructure routière. En tant que Maire adjointe à la voirie, aux déplacements et à l’eau dans la ville, ce sujet me concerne au premier chef et je le porterai avec conviction. Il faut s’attacher à la cause : réduire le trafic automobile et réserver une voie aux transports en commun et à la logistique de desserte de la petite couronne et de Paris.

La pollution de l’air bat des records, 7 fois les normes admises par l’OMS. la pollution sonore est aussi au-delà des seuils, avec des risques sur la santé et l’apprentissage des enfants. C’est un enjeu de santé majeur pour les dizaines de milliers de personnes qui habitent à proximité. Il faut agir sans attendre, même si comme je l’ai dit, c’est un projet de long terme.

On entend dans la rue « Il faut casser l’échangeur ». Oui il faut réduire la pollution sans attendre et commencer à rogner ce monstre en démontant ses bretelles.

La note indique que 2,5 hectares de surface perméable vont être gagnés par le projet sur un total actuel de 13,3 hectares occupés aujourd’hui par l’échangeur, autant dire que cela reste un projet cosmétique du point de vue de l’aménagement urbain et qu’on est très loin de la réparation de la ville déchirée par ce monstre de béton.

On peut s’interroger encore plus quand on voit que sur les 2,5 hectares récupérés, 1,5 sera consacré à du foncier valorisable, c’est à dire à de nouvelles constructions ! Quand la note évoque « l’émergence d’un nouveau quartier dans la ville grâce à l’enfouissement total de l’échangeur », il faut comprendre juste l’inverse : pour financer l’enfouissement, il faut construire et construire encore. Je ne crois pas que les habitant.e.s de notre ville souhaitent voir la construction d’une deuxième Capsulerie à côté de la première !

Comme écologistes, à Est Ensemble comme à Paris ou à Bagnolet, nous avons les plus fortes réserves sur cet enfouissement qui ne résout rien. La pollution de l’air continuera et les nouveaux immeubles qui verront le jour, y seront directement exposés. Le chantier est pharaonique, l’enfouissement total suppose un creusement bien plus important que celui indiqué, il devrait commencer très en amont…

Pour conclure, nous sommes face à un défi urbain et écologique majeur. L’échangeur est ce qu’on appelle un commun négatif, à savoir une infrastructure du passé dont nous héritons, et qui n’a que cinquante ans. L’étude d’opportunité prévue doit donner une perspective pour à la fois faire émerger un territoire vivable, respirable, résilient aux inondations et aux canicules, et transformer cette infrastructure de façon rationnelle d’un point de vue écologique et économique. La démanteler tout en préservant nos objectifs pour un avenir ouvert et sobre…

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