Stationnement payant: éviter le surplace

Une nouvelle tarification pour le stationnement a été votée au conseil municipal du mercredi 31 janvier. Même si elle n’est pas complètement  satisfaisante, c’est un (petit) pas dans la bonne direction. Voici la belle intervention d’Edith Félix, maire-adjointe à la voirie, qui donne du sens à l’action municipale. A la suite, une brève mise au point sur la validation de la délibération présentée au conseil municipal…

Stationnement « payant » rue Grain d’Orge, photo DR.

« Cette délibération vise à revoir les tarifs du stationnement payant en zone rouge, la zone du centre ville et des axes de services ou de commerce, afin de préciser les conditions du marché par lequel la ville choisira un délégataire pour opérer le stationnement payant.

Ce marché est nécessaire, la reprise en main de notre stationnement est attendue depuis de longs mois, et cette délibération en est une étape pour avancer dans ce processus. Les tarifs sont présentés dans la note, similaires à ceux de communes limitrophes. Je vous invite à les voter. Pourquoi ne pas opérer en régie ? Tout simplement parce que la ville n’a pas les capacités d’investissement nécessaires à la restauration du parc des horodateurs. C’est un autre débat que nous avons mené lors d’une séance précédente du Conseil Municipal.

Le sujet est traité par la Direction de la voirie, des déplacements et des espaces publics. Il est du ressort de ma délégation de vous en faire rapport. Et finalement, je trouve un grand intérêt à ce sujet car il est très politique. Il porte avec lui tout un potentiel de transformation de nos usages au quotidien, avec de vraies valeurs d’écologie et de qualité de vie. Il peut susciter la controverse au sein des usager.e.s eux-mêmes. Il mérite de ce fait l’attention de toutes les Bagnoletaises et tous les Bagnoletais. Je me permets donc de reprendre ici les fondements de cette question et les raisons de ce mouvement de réappropriation publique du stationnement.

Premièrement, au jour d’aujourd’hui, l’ensemble des voiries de Bagnolet sont gratuites pour le stationnement, que ce soit dans l’ancienne zone rouge de centre ville où les horodateurs sont obsolètes, ou dans la zone bleue réglementée pour laquelle la vignette « résidents » offre un stationnement gratuit, et le disque bleu permet aux visiteurs extérieurs de rester 2h sans payer, sujets au contrôle des ASVP. Ceci procure un effet d’appel de véhicules des communes limitrophes pour le confort offert par notre espace public. Pour désengorger nos voiries, il faut instaurer un stationnement payant pour les visiteurs sur l’ensemble de la ville et mener une réflexion sur la valeur du forfait pour les résidents usagers d’une automobile. Seulement environ la moitié des ménages de Bagnolet ont une voiture, avec des différences selon les quartiers : plus de voitures dans les quartiers plus aisés.

Car finalement, qu’est-ce que le stationnement gratuit sur voirie ? C’est la privatisation par le propriétaire de la voiture ou son usager, d’un commun, d’un espace qui appartient à toutes et à tous, et dont on doit penser politiquement son usage. Comment se fait-il que notre société ait intégré à ce point la voiture et que nous ne soyons plus étonnés que 80% de l’espace public, entre les chaussées de circulation et les stationnements, soit dévolu à l’automobile, plutôt qu’aux piétons, aux cycles, aux mobilités douces, aux arbres et à la nature en ville! Est-il juste que le stationnement soit presque généralisé le long de nos rues, et qu’il soit gratuit ? Est-ce vraiment notre vision de la ville, celle où les rangées de voitures obstruent l’horizon mental de notre avenir commun, celui du CO2 et des particules de pollution ? Où ces rangées de voiture empêchent les enfants de s’épanouir sur les trottoirs, et étouffent tout espoir de renouer avec la biodiversité ? Il faut viser à réduire l’empreinte de la voiture sur notre espace public. On n’en a pas trop fait jusqu’à présent dans ce domaine.

Deuxièmement, l’une des batailles les plus importantes dans cette réappropriation publique, c’est de garantir l’accessibilité des trottoirs et des passages piétons. Les stationnements gênants sont une plaie pour l’accessibilité. A cela s’ajoute le stationnement en double file, source de danger et d’inconfort pour les cyclistes. Un cabinet d’étude spécialisé avait répertorié 1000 heures de stationnement en double file par jour sur la petite commune de Bagnolet.

C’est sur cette bataille qu’il faut mobiliser nos ASVP. Rappelons qu’un délégataire de contrôle de stationnement payant n’est pas délégué à la verbalisation des stationnements gênants, ce sont toujours les ASVP qui s’en chargent. Préservons-les pour ces missions.

Troisièmement, les tarifs discutés aujourd’hui dans la note concernent la nouvelle zone rouge, comprenant l’ancienne zone payante du centre ville, plus un certain nombre d’axes. Pour cette zone, l’objectif est double : 1. empêcher le stationnement de longue durée de véhicules qui s’y parquent, 2. favoriser la rotation des véhicules pour favoriser l’accès aux services : services de santé, commerces, consulat du Mali, etc.

Pour le détail des nouvelles voies en zone rouge de stationnement courte durée, on peut lister la plupart des axes passants : l’avenue de la République, l’avenue Gambetta, l’avenue Pasteur, l’avenue Stalingrad, la rue François Mitterrand, ou des axes commerçants : la rue Sadi Carnot au niveau de l’église, la rue Robespierre aux Coutures, la rue Helvetius et la rue Daumier ; des rues à proximité de services : la rue Pierre et Marie Curie, la rue Raymond Lefebvre, la rue Hoche dans sa partie haute, la rue Jean Jaurès, la rue Parmentier, la rue Floréal ; des rues limitrophes : la rue Etienne Marcel, la rue Noisy-le-Sec vers Paris, voilà pour la plupart. Les tarifs sont applicables du lundi au samedi compris, de 9h à 19h.

En ce qui concerne la rotation des véhicules stationnés pour favoriser l’accès aux services, le choix d’un délégataire devrait agir positivement car il est porté mécaniquement à un contrôle plus régulier des stationnements. Et pour cause, c’est le délégataire encaisse les forfaits de stationnement. Le délégataire a donc intérêt à déployer les moyens suffisants pour contrôler le paiement des forfaits. (En cas de dépassement de la durée payée, le délégataire peut émettre des forfaits post-stationnement qui seront eux, encaissés finalement par la ville. En aucun cas il ne peut verbaliser un stationnement gênant, en dehors des places blanches marquées « payant ». )

Le choix du tarif n’est donc pas un choix économique, c’est un choix politique. Sareco, un cabinet d’étude spécialisé a fait pour la ville une pré-étude avec une première estimation de la viabilité de la DSP basée sur le tarif minimum recommandé par le Plan de déplacements urbains d’Île-de-France (PDUIF) introduit par la Loi d’orientation des mobilités et sur le Plan Local de Mobilités en cours d’adoption au printemps à Est Ensemble, soit 1,5 € pour la 1ère heure, et 3,5 € pour la 2e heure consécutive. A ce tarif, la DSP serait déjà très rentable. La note propose un tarif de 2,10 € de l’heure, et 4,20€ pour deux heures consécutives, ce qui est d’autant plus pour le délégataire.

Les tarifs de stationnement pour une heure appliqués jusqu’à présent dans les villes d’Est Ensemble. Le tarif de Bagnolet étant fictif, faute d’horodateurs en fonctionnement.

Ce qui a présidé au choix du tarif, c’est plutôt l’idée de s’aligner sur les communes voisines. La note montre en effet le retard qu’a la ville sur ses voisines 1,50 € à Bagnolet contre entre 2,10 € et 2,60 € pour toutes les villes limitrophes de Paris, Montreuil, Les Lilas, Le Pré Saint-Gervais. On le voit, la ville n’était pas motrice jusqu’à présent sur ce dossier. On peut se réjouir qu’elle avance désormais, mais c’est à petit pas. C’est un début, mais ne perdons pas de vue les nombreuses phases à mettre en œuvre pour faire un politique vraiment significative en faveur d’un autre usage de l’espace public.

Le choix de 2,10 € de l’heure pour Bagnolet, tel que proposé dans la note, se base sur Montreuil, à la différence que Montreuil consent un tarif de 60 centimes pour un quart d’heure, alors que pour Bagnolet, il faudra nécessairement payer 1,10€ pour la première demi-heure.

Le risque d’imposer un tarif d’entrée élevé pour des affaires de courte durée, c’est que les automobilistes préfèrent se garer directement en stationnement gênant où ils ne pourront pas être verbalisés… Pour éviter ce risque, je souhaite que l’on ajoute la possibilité pour l’automobiliste de payer pour seulement un quart d’heure pour 50 centimes.

La grille tarifaire adoptée par le Conseil municipal.

On a dit que l’objectif pour la zone rouge, c’est de favoriser la rotation. C’est à ce dernier objectif que le tarif doit être adapté. Proposer d’une part un tarif court d’un quart d’heure pour inciter au départ rapide. Proposer d’autre part un tarif progressif, c’est-à-dire que la demi-heure devient plus chère à mesure que le véhicule reste longtemps sur place. C’est ce qui manque à la tarification proposée un peu hâtivement, en imitation, il faut le dire, de notre voisin de Montreuil. En cela la tarification proposée n’est pas conforme aux recommandations du Plan de déplacements urbains d’Île-de-France (PDUIF) et du Plan Local des Mobilités d’Est Ensemble. C’est ennuyeux. Préoccupant aussi le fait qu’en tant élue en charge du secteur, je n’ai pas été associée à la rédaction de la note, ce qui est en soi un dysfonctionnement. La démocratie me permet de l’indiquer aujourd’hui, ne vous en déplaise, le temps d’un conseil municipal.

On le voit, il faudra faire évoluer l’ensemble des dispositions prises jusqu’à maintenant. Mais se mettre en route, c’est déjà le plus important. En espérant qu’à l’avenir, la ville saura procéder au suivi attentif de son délégataire et accélérer son rythme d’actions sur les projets. »

Mise au point

Contrairement à ce qui a été dit en Conseil municipal, la délibération proposée n’a pas été validée par Edith Félix qui souhaitait qu’elle soit modifiée, mais par le maire lui-même.

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