Les associations écologistes vent debout contre le projet d’aménagement de la porte de Montreuil

Une dizaine d’associations environnementales lancent une pétition contre le projet d’aménagement de la porte de Montreuil. Un article d’Aude Loriaux dans 20 minutes.

  • Le projet d’aménagement de la porte de Montreuil, qui a pour ambition de créer à Paris une place publique végétalisée au lieu de l’actuel rond-point, suscite l’opposition de nombreuses associations écologistes.
  • Elles appellent dans une pétition les conseillers et conseillères de Paris à revoir leur projet, présenté le 13 octobre au conseil de Paris.
  • Alternatiba, Les Amis de la Terre ou encore Greenpeace reprochent au futur projet d’aggraver la pollution et de faire disparaître de la pleine terre.

« Une régression à tous points de vue par rapport à l’état existant » : une dizaine d’associations environnementales lancent une pétition contre le projet d’aménagement de la Porte de Montreuil, sur lequel les conseillers et conseillères de Paris sont appelés à voter, à la faveur d’un vœu des écologistes qui demandent une remise à plat du projet.

« Il est possible de construire, rapidement et même à moindre coût, un autre projet qui satisferait plus largement les besoins urgents sociaux et environnementaux » notent les associations Alternatiba Paris, Respire, Les Amis de la Terre Paris, Greenpeace Paris, France Nature Environnement Paris, le GNSA, Extinction Rébellion, Réseau Environnement Santé et Environnement 93, reprochant au projet d’exposer « plus de franciliennes et franciliens à des niveaux nuisibles de pollution de l’air ».

« Une muraille de hauts immeubles »

Le projet d’aménagement de la porte de Montreuil, un projet à 140 millions d’euros dont les travaux doivent réellement commencer en 2023, a pour ambition de créer une place publique végétalisée au lieu de l’actuel rond-point, une halle avec mezzanine pour les puces et un immeuble-pont de bureaux et d’hôtellerie juste au-dessus du périphérique.

« La « canyonnisation » du boulevard par sa mise en tunnel et l’élévation d’une muraille de hauts immeubles aurait pour corollaire de concentrer les polluants et de réduire leur dispersion » taclent les associations écologistes, qui demandent aux conseillers de Paris « de reconsidérer intégralement ce projet ».

Alors que la cour administrative d’appel de Paris a confirmé jeudi l’annulation des permis de construire délivrés pour des bâtiments sur des dalles recouvrant le boulevard périphérique à proximité de la porte Maillot, les associations écologistes estiment que cette décision les renforce dans leur requête.

« Faire disparaître de la pleine terre c’est grave »

Sur le plan du climat, le projet est aussi pointé du doigt, notamment la création de bâtiments sur de la pleine terre. « Alors que les épisodes de sécheresse et de canicule se multiplient, comment faire croire que la végétalisation d’une dalle de béton pourrait « compenser » le bétonnage irréversible des espaces arborés en pleine terre des talus du périphérique et de ses abords ? » clame le texte.

Contactée par 20 Minutes, Christine Nedelec, présidente de France nature environnement Paris, estime « grave de continuer à exposer les gens à des situations dégradées », en référence au fait qu’il s’agit d’un des territoires les plus pollués de Paris. « Une ville qui est soucieuse de la santé de ses habitants ne doit pas les installer dans des sites où la pollution actuelle est au-delà des seuils réglementaires. Il faut faire des jardins, planter des arbres, et ne surtout pas détruire les talus arborés du périphérique. Faire disparaître de la pleine terre c’est grave. Un sol ancien est vivant, c’est précieux, on ne peut pas le reconstituer comme ça abracadabra, il faut des années, des millénaires pour le reconstituer », juge la responsable associative.

« Engorgement des rues environnantes »

« Le périphérique est bordé de beaux talus arborés constituant un écran verdoyant entre l’infrastructure routière et les quartiers riverains de l’ancienne ceinture verte de Paris […]. Il est incompréhensible de ne pas en tenir compte et de vouloir construire sur ces talus trois immeubles de bureaux avec commerces, offrant aux occupants les gaz d’échappement, alors même que la cour administrative d’appel de Paris vient de confirmer l’annulation de permis de construire des immeubles-ponts aux portes Maillot et de Champerret pour raison sanitaire », affirment aussi dans une tribune un ancien adjoint à la direction de l’urbanisme de la ville de Paris, un philosophe et une critique architecture-ville-paysage.

Le texte de la pétition alerte aussi sur les problèmes de congestion du trafic que risque d‘engendrer le projet. « En l’état, il provoquerait un engorgement des rues environnantes et un report, donc une dégradation de la sécurité, en périphérie », énonce-t-il. En juin la Mission régionale d’autorité environnementale (Mrae) en Ile-de-France recommandait « d’approfondir la justification de la capacité du boulevard périphérique à absorber les reports de trafic induit par le projet. »

Voici la lettre envoyée aux conseillers et conseillères de Paris par les associations environnementales, texte qui sert de base à la pétition lancée.

Mesdames les Conseillères, messieurs les Conseillers,

Il figure à l’ordre du jour du Conseil de Paris qui s’ouvre ce mardi 11 octobre le dossier de l’aménagement de la Porte de Montreuil.

Les associations œuvrant en matière de protection de l’environnement, dont notamment Alternatiba Paris, Respire, Les Amis de la Terre Paris, Greenpeace Paris, France Nature Environnement Paris, le GNSA et Extinction Rébellion, rappellent à cette occasion leur opposition à ce projet qui, loin de satisfaire les besoins recensés, représente, au contraire, une régression à tous points de vue par rapport à l’état existant (pourtant déjà fort peu satisfaisant)

Sur le plan sanitaire d’abord, ce projet consisterait à exposer encore plus de Franciliennes et franciliens à des niveaux nuisibles de pollution de l’air.

Comme il l’avait été souligné durant l’enquête publique, la « canyonnisation » du boulevard par sa mise en tunnel et l’élévation d’une muraille de hauts immeubles, aurait pour corollaire de concentrer les polluants et de réduire leur dispersion.

La confirmation de l’annulation judiciaire, jeudi dernier, pour cause d’insalubrité publique, des projets Mille arbres et Multistrates, fondés sur le même principe de ‘couverture’, commande d’arrêter de jouer avec la santé de nos concitoyennes et concitoyens en négligeant les risques que de tels aménagements représentent.

Sur le plan de l’adaptation au défi climatique, le compte est également loin d’y être.

Alors que les épisodes de sécheresse et de canicule se multiplient, comment faire croire que la végétalisation d’une dalle de béton pourrait compenser le bétonnage irréversible des espaces arborés en pleine terre des talus du périphérique et de ses abords ?

A porte de Montreuil, 88 arbres matures en bonne santé qui avaient été plantés en 1972 ont déjà été préventivement abattus cette année.

– 200 en tout devraient l’être pour faire place à des immeubles de verre et d’acier.

Remplacer ce précieux patrimoine arboré par la plantation de ‘nouveaux’ ne compensera rien avant plusieurs dizaines d’années alors que, plus que jamais, Paris doit préserver ses grands arbres matures qui, seuls, offrent, de manière durable et autonome, l’ombrage et la fraîcheur dont nos villes ont besoin.

Là encore, le contre-bilan du réaménagement de la place de la République doit amener à savoir se remettre en cause.

Enfin ce projet, qui consiste in fine, à libérer du foncier public pour permettre à des promoteurs privés d’y édifier des immeubles de bureaux, aussi lucratifs, pour eux, qu’inutiles pour la population, ne répond pas aux attentes locales.

Les gens demandent avant tout plus de sécurité, plus de facilité pour traverser et parcourir, à pied, cet espace entre Montreuil et Paris.

Pour y assurer la pacification de la circulation automobile, il aurait donc fallu mettre en œuvre un plan cohérent de déplacements à une échelle élargie du secteur.

Or, en l’état, rien n’a été sérieusement envisagé pour satisfaire cet objectif.

La Mission Régionale d’Autorité Environnementale a, là encore, alerté en vain sur l’inadaptation du projet à la réalité des flux.

En l’état, il provoquerait un engorgement des rues environnantes et un report, donc une dégradation de la sécurité, en périphérie.

A Porte de Clichy, la densification d’un quartier sans qu’il soit mis en œuvre, à une échelle pertinente, une stratégie de déplacements sérieuse et réaliste, a conduit à l’engorgement délétère du carrefour, qui hélas a coûté la vie, faut-il le rappeler ? ; à plusieurs cyclistes.

En conséquence, nous vous appelons collectivement à prendre la mesure de la gravité de la situation pour accepter de reconsidérer intégralement ce projet.

Il est possible de construire, rapidement et même à moindre coût, un autre projet qui satisferait plus largement les besoins urgents sociaux et environnementaux.

Nos associations et leurs adhérents sont prêts à contribuer à cet effort et demandent seulement qu’il soit mis en œuvre une véritable démarche de conception collective, et non comme cela a été fait dans le cas présent, un contreproductif processus d’avalisation d’une programmation déjà entérinée.

Mesdames et Messieurs les Conseillères et Conseillers, nous vous en remercions par avance et vous prions d’agréer, l’expression de nos sentiments distingués.

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