Le 10 mai, le conseil d’administration de la régie publique de l’eau d’Est Ensemble s’est réuni pour voter son premier budget. Voici les propos introductifs de son président, Jean-Claude Oliva.
Enfin, on se retrouve après plusieurs reports !
Tout d’abord je voudrais souhaiter la bienvenue à Mme Jennifer Lopez qui vient compléter notre CA. Mme Lopez est issue de la convention citoyenne pour le climat d’Est Ensemble et a été tirée au sort parmi les volontaires pour participer au Conseil d’administration de la régie.
Je voudrais ensuite partager avec vous quelques réflexions d’actualité.
Depuis l’été dernier, la crise de l’eau a fait irruption dans notre pays. On se croyait protégés ou pas immédiatement concernés par le changement climatique, on a découvert collectivement qu’il n’en était rien. Les canicules à répétition, la sécheresse, les incendies ont marqué l’été et les esprits.
Nous savons d’ores et déjà que l’été 2023 n’aura rien à envier à l’été 2022 du point de vue de la sécheresse. Les nappes ne se sont pas suffisamment rechargées pendant l’hiver. Les pluies des derniers jours bénéficieront surtout à la végétation.
Cette situation aiguise les conflits entre partage de l’eau dans l’intérêt général et accaparement pour des activités privées. A Sainte Soline, le week-end des 24, 25 et 26 mars, 30 000 personnes ont montré leur détermination à construire un avenir écologique et solidaire autour de l’eau.
Je ne reviens pas ici sur la répression policière inouïe qui est un sujet en soi et qui concerne d’ailleurs tout le mouvement social, on le voit bien pour la réforme des retraites…Pendant les trois jours à Sainte Soline et à Melle, s’est déployé un beau mouvement pour l’eau, commun public et naturel.
Cette mobilisation sans précédent dans notre pays exprime la montée de la sensibilisation et de la compréhension collective des enjeux autour de l’eau. Des luttes sur l’eau de toute la France et même de l’international ont convergé. On comprend mieux à quoi on se confronte et ce qu’on veut. On parle de changement climatique, d’alimentation et d’agriculture, de modèles économiques. La question démocratique est plus présente que jamais…
Le président de la République a répondu le 30 mars par l’annonce d’un plan eau, qui ne porte pas une vision systémique de la crise de l’eau et des réponses à lui apporter et qui est même en retrait par rapport aux Assises de l’eau de 2019.
Une autre manifestation de cette nouvelle conscience de l’eau est la pétition pour que Coca-Cola cesse de pomper dans la nappe phréatique à Grigny qui est en passe d’atteindre les 50 000 signatures en quelques jours. Là aussi, il s’agit de faire passer l’intérêt général avant des intérêts particuliers. Remarquons au passage qu’il s’agit de la nappe souterraine de l’ypresien qui alimente notre usine de Pantin et dont l’utilisation devrait être réservée au secours en eau potable à l’échelle de la région parisienne.
Au souci pour la quantité d’eau s’ajoutent des alertes sur sa qualité. Ainsi une étude de l’Anses (agence sanitaire) a mis en évidence la présence généralisée d’un résidu de pesticide dans les eaux de boissons.
Le seuil d’alerte (limite de qualité) a été franchi mais il semble qu’on soit encore assez loin du risque sanitaire (valeur sanitaire maximale). Et il faut savoir aussi que l’essentiel des pesticides que nous absorbons, ne provient pas de l’eau mais du reste de notre alimentation.
Bien entendu, des mesures de prévention s’imposent pour réduire la quantité des pesticides dans l’eau et dans l’environnement. Une pétition à l’initiative de maires, de présidents de régies d’eau potables et de responsables associatifs demande leur interdiction immédiate dans les aires d’alimentation des captages d’eau.
Cela m’amène à un dernier point. Le Sedif souhaite mettre en place un nouveau procédé de traitement de l’eau : l’osmose inverse basse pression. C’est l’équivalent pour l’eau douce, de la desalinisation de l’eau de mer.
L’eau produite est déminéralisée : elle n’est pas potable. Elle doit être mélangée avec une eau d’une autre filière (nanofiltration) pour être consommée.
Ce procédé est controversé pour plusieurs raisons. Il amène une consommation d’énergie supplémentaire importante : +45% ! Il nécessite un prélèvement supplémentaire d’eau de 15% (quand le plan eau demande de réduire nos prélèvements de 10%). Il conduit au rejet de concentrats de polluants dans les cours d’eau.
Ce procédé est aussi très coûteux : 870 millions d’euros en investissements, plus des frais de fonctionnement supplémentaires. Le coût de production de l’eau va être multiplié par deux. Et une hausse de facture de 30 à 40 cts / m3 (pour 1,47 €/m3 aujourd’hui) est d’ores et déjà annoncée pour les usagers domestiques.
Ce projet est jusqu’au 20 juillet le sujet d’un débat organisé par la commission nationale du débat public, sous différentes modalités : réunions publiques, stands, plateforme numérique, etc.
Est Ensemble est bien entendu concerné, même si l’EPT ne fait plus partie du SEDIF. Ce projet remet notamment en question les possibilités de mutualisation et de secours entre opérateurs en région parisienne.
Aussi il me semble important d’inciter les habitants d’Est Ensemble à s’informer et à participer au débat public. Dans ce sens, une adresse de plusieurs EPT (Est Ensemble, GOSB, …) et d’autres intercommunalités (GPS, etc.) est en préparation.
Sur le fond, l’EPT pourra aussi discuter et exprimer sa position dans le cadre du débat public.
Vous le voyez, avec la régie publique, vous êtes au cœur de nombreux enjeux d’avenir pour notre territoire et ses habitants.