Le Grand Paris est particulièrement vulnérable à la crise climatique

Avec 87 % de surface urbanisée, la métropole sera une fournaise s’alarment des élus du groupe écologiste social et citoyen dans une tribune au « Monde » où ils appellent notamment à sanctuariser ce qui reste des terres agricoles et forestières.

La Métropole du Grand Paris (MGP) travaille actuellement sur un schéma de cohérence territoriale (SCoT) qui devra, sur la question climatique, tracer des lignes suffisamment claires et fortes pour rattraper le retard pris et limiter les risques au maximum. L’avenir de la métropole en dépend.
En premier lieu, il faut sanctuariser et développer les terres agricoles et forestières. Ces terres représentent un atout majeur pour assurer notre résilience, rafraîchir notre territoire et améliorer l’alimentation et la qualité de vie. Or, elles fondent comme neige au soleil. Entre 1982 et 2017 la Métropole a perdu plus de la moitié de ses terres agricoles.
Chaque commune, prise séparément, est d’accord pour les préserver mais a toujours une bonne raison pour faire des exceptions. Ainsi, de demi-parcelle en demi-parcelle, notre territoire s’ampute progressivement de ses organes vitaux. Il faut y mettre fin, sans exception.
De la responsabilité des collectivités
Ensuite, le sol de la métropole doit être massivement désartificialisé pour que l’eau puisse s’écouler, éviter les inondations. La présence de la nature doit être développée et sanctuarisée en ville. Pour répondre aux impérieux besoins de logements sociaux, il faut réinvestir les parcelles en friche ou déjà construites, soit en transformant les bâtis existants soit en proposant des formes de constructions plus légères qui préservent la pleine terre.
C’est pourquoi, en ville, nous proposons 30 % de pleine terre minimum par quartier et une compensation de 2m² de pleine terre pour 1m² artificialisé à l’échelle du territoire. Enfin, les populations doivent impérativement être préservées des crues. Aussi, dans les zones inondables, par débordement ou remontée de nappe, les constructions nouvelles doivent être absolument évitées et ces zones préservées.
Ces inondations seront de plus en plus fréquentes, intenses et violentes dans le temps. Il appartient à la Métropole, qui en a la compétence, d’assurer la sécurité des populations. La jurisprudence climatique se renforce, ainsi que la responsabilité des collectivités et de leurs élues et élus.
Une forte densité avec des îlots de chaleur urbains
Quelle métropole voulons-nous ? Si nous continuons l’aménagement et l’urbanisme des dernières décennies nous irons dans le mur. Nul besoin de décrire longuement la situation climatique. Cette année elle a sauté aux yeux : les méga-feux qui ont ravagé la Californie, la Sibérie ou la Grèce ; le dôme de chaleur de 50 °C qui a frappé le Canada ; les inondations qui ont englouti des terres entières en Belgique comme en Allemagne et celles de la fin de l’été à Marseille.
Le dernier rapport du GIEC d’août 2021 rehausse l’inquiétude. Les prévisions des rapports précédents se réalisent mais en suivant le pire scénario et plus rapidement que prévu. Des phénomènes que l’on attendait en 2050 risquent de nous atteindre dès 2030. Objectivement, notre territoire n’est pas prêt à affronter la situation.
Le Grand Paris est particulièrement vulnérable. Tout d’abord, en raison de sa densité et de ses très nombreux îlots de chaleur urbains liés à sa minéralisation : 73 % de la population métropolitaine réside dans un quartier soumis à un effet moyen à fort d’îlot de chaleur urbain. Avec 87 % de surface urbanisée, la chaleur sera particulièrement difficile à supporter dans le Grand Paris.
Une perte de biodiversité préoccupante
Ensuite, les sécheresses vont menacer notre approvisionnement en eau potable. Dans le même temps, les pluies diluviennes et les crues vont augmenter en fréquence et en intensité. Mais elles n’alimenteront pas le renouvellement des nappes souterraines. Fortement artificialisé, le sol de la métropole provoque des ruissellements intenses, augmentant les crues, saturant les infrastructures, sans pour autant renouveler les nappes souterraines.
Enfin, la perte de biodiversité est particulièrement préoccupante : les forêts, les milieux semi-naturels et les espaces agricoles ne représentent plus que 11 % de l’occupation des sols de la Métropole. Le moineau domestique a perdu 73 % de ses effectifs en treize ans seulement. Les populations de papillons et d’oiseaux ont diminué respectivement de 20 % et 40 % au cours des deux dernières décennies en Ile-de-France.
La crise sanitaire du Covid a encore plus révélé la fragilité de notre écosystème. Les forces vives les plus qualifiées, celles qui ont les moyens de trouver de l’emploi partout préféreront vivre ailleurs en France, là où le cadre de vie sera meilleur. 80 % des cadres et presque autant des familles aspirent à quitter la métropole. Celles et ceux qui n’auront que le choix de rester paieront cher les décisions qui n’auront pas été prises. Quelle injustice !
Dépasser le seul intérêt communal
Créée à l’origine pour améliorer le cadre de vie de ses habitants en réduisant les inégalités territoriales, la Métropole du Grand Paris se retrouve en première ligne. Concernant nos émissions de gaz à effet de serre, la Métropole a fait un formidable travail en assumant un plan Climat parmi les plus ambitieux en France et en déployant la zone à faible émission pour protéger la santé des habitantes et des habitants.
Cette même volonté est nécessaire pour adapter notre territoire au dérèglement climatique malheureusement inéluctable. Il est légitime que les maires veuillent garder la main sur leur urbanisme, via les établissements publics territoriaux, le SCoT métropolitain ne s’y oppose pas.
Mais il faut bien comprendre que le fondement de la Métropole est de dépasser le seul intérêt communal pour résoudre les grands défis à la bonne échelle. Et s’il y en a bien un, c’est le réchauffement climatique. L’oublier serait condamner la Métropole et prendre une lourde responsabilité vis-à-vis de ses habitantes et de ses habitants.

Les signataires de cette tribune sont : Anne de Rugy et Sylvain Raifaud, coprésidents du Groupe écologiste social et citoyen à la Métropole du Grand Paris (MGP) avec le soutien d’élus et anciens élus du groupe : David Belliard, conseiller métropolitain, maire adjoint de Paris en charge de l’espace public et des transports ; Daniel Breuiller, ancien maire d’Arcueil et vice-président de la MGP ; Patrick Chaimovitch, maire de Colombes et vice-président de la MGP en charge de la rénovation énergétique ; Yves Contassot, ancien président du Groupe écologiste et citoyen de la MGP ; Virginie Daspet, maire adjointe du 20e Arrondissement de Paris, conseillère déléguée de la MGP ; François Dechy, maire de Romainville et conseiller délégué de la MGP ; Antoinette Guhl, vice-présidente de la MGP chargée de la nature, de la biodiversité et de l’agriculture ; Fatoumata Koné, présidente du Groupe écologiste au Conseil de Paris ; Christian Métairie, maire d’Arcueil ; Emile Meunier, président de la Commission urbanisme du Conseil de Paris ; Philippe Monges, élu à L’Île-Saint-Denis et à la MGP, 1er vice-président de Plaine Commune ; Anne Souyris, maire adjointe de Paris en charge de la santé

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