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René, réveille-toi, ils sont devenus fous!

René Dumont, candidat écologiste à l’élection présidentielle de 1974

Comme beaucoup d’écologistes, j’ai voté Yannick Jadot aux élections européennes. Mais quelle déception avec la préparation des municipales! Par Jean-Claude Oliva

Les Verts autrichiens exultent. Ils sont enfin au pouvoir… avec les Conservateurs. Pour Romaric Godin de Médiapart (lire ici) « En acceptant les politiques néolibérales et identitaires de la droite pour prix d’une politique écologique ambitieuse sur le papier, mais sans moyens concrets, les Verts renoncent à allier l’écologie aux intérêts des classes moyennes, acceptent de se taire sur la question des migrants et reconnaissent que la priorité réelle doit être non pas l’environnement, mais bien la compétition économique (…) Faute de sauver la planète, les Verts autrichiens semblent donc s’engager à sauver le néolibéralisme. » Est-ce la voie sur laquelle nous entraînent Yannick Jadot et ses ami-es?

Des alliances troublantes, de Paris….

La question se pose au vu des alliances troublantes, voire contre-nature c’est le cas de le dire, d’EELV pour les élections municipales. A Paris, EELV mène la bataille contre la maire Anne Hidalgo dont le bilan écologique est pourtant incontestable et résulte en grande partie de l’action d’élu-es écologistes comme Célia Blauel ou Christophe Nadjowski. Dans le club planétaire des grandes villes, Paris est une de celles qui s’est engagée le plus fort dans les politiques écologiques de réduction de la place de la voiture ou de végétalisation. Certes, cela n’est pas encore suffisant, aucune ville, aucun pays n’en fait assez, ne cesse de répéter Greta Thunberg. Mais de là, à se rapprocher de Cédric Villani, député LREM, dont le seul engagement écologique consiste à s’absenter de l’hémicycle lors de certains votes… La volonté de rompre avec la social-démocratie de gouvernement pourrait se comprendre, tant cette dernière s’est compromise, encore faudrait-il que l’écologie soit la boussole des nouvelles alliances!

…à Bagnolet

A Bagnolet, si le bilan écologique n’est pas comparable à celui de Paris, de premiers pas importants ont été faits, avec un moratoire depuis trois ans sur les projets immobiliers, avec l’engagement en faveur de la gestion publique de l’eau ou encore le maintien de la bergerie des Malassis. Et des engagements majeurs sont pris pour l’avenir avec l’alliance conclue avec Écolos solidaires et le soutien de Génération Ecologie. Mais la direction d’EELV (qui n’a pas de groupe local à Bagnolet et dont les adhérent-es se répartissent sur trois listes) lorgne vers une alliance de second tour avec Laurent Jamet, ancien premier adjoint et adjoint à l’urbanisme (avant 2014), à l’origine de la déferlante immobilière qui a défiguré la ville. Qu’est-ce donc qui conduit EELV à préférer s’allier aux adversaires de l’écologie plutôt qu’à ses ami-es?

Affaiblir la gauche

Depuis sa création, EELV n’a jamais réussi à se développer et reste un micro-parti, 5000 adhérent-es revendiqué-es avant les européennes, 10 000 (?) après. Si tout le PS prenait le virage de l’écologie -comme Anne Hidalgo l’a fait à Paris- EELV risquerait de passer au second plan de l’écologie voire au troisième, si on considère aussi les professions de foi écologistes de la France insoumise. Plutôt que de miser sur l’émergence d’une grande force écologiste transcendant la gauche, EELV joue l’affaiblissement de toute la gauche pour récupérer la mise avec Yannick Jadot aux prochaines présidentielles. C’est grosso modo, la même stratégie que la France insoumise après les élections présidentielles de 2017, tapant très fort sur la gauche et sur les écologistes pour tenter de se poser comme l’unique opposition à Macron. On voit où cela a conduit la France insoumise, faut-il vraiment recommencer la même expérience?

C’est pas la faute à Rousseau…

D’autant que cette stratégie passe à côté de l’essentiel. Si EELV n’a pas réussi à s’imposer jusqu’à présent malgré une prégnance de plus en plus forte des idées écologistes dans le pays, c’est pas la faute à Rousseau, ni à la concurrence des autres formations politiques, mais bien aux limites du parti écologiste lui-même. Et c’est sans doute cela qu’il faudrait dépasser. EELV est une sorte de vitrine électorale de l’écologie, mais malheureusement, il n’y a pas derrière de construction politique: comment avancer dans ces conditions? Un exemple récent: entre les animalistes, les tenants de l’alternative végétarienne, les vegans, la bio, les éleveurs de la Confédération paysanne, les activistes de L 214, etc. , il y a toute une gamme d’engagements qui relèvent de l’arc écologiste, toute une effervescence de réflexions qui mériteraient une confrontation sérieuse et passionnante pour dégager des options et des actions communes. Qui est mieux placé qu’un parti écologiste pour mener ce débat et réaliser cette convergence indispensable? Au lieu de s’atteler à ce travail de fond, EELV a édité un catalogue à la Prévert de « 85 propositions pour les animaux » pour les élections municipales… L’autre faiblesse d’EELV, c’est son fonctionnement interne particulièrement opaque pour le commun de ses membres dont je fais partie. Certes il n’y a pas d’autoritarisme mais pas de démocratie non plus: malgré un formalisme pesant, ses adhérent-es ne sont pas associé-es à l’élaboration de la stratégie, définie en vase clos par ses instances dirigeantes. Aussi, faute de pouvoir faire de la politique autrement à EELV, beaucoup d’écologistes font de la politique ailleurs.

Écologie, année zéro

Meeting chaleureux pour le lancement de la liste Bagnolet écologique et solidaire conduite par Tony Di Martino. Voici des extraits de l’intervention de Jean-Claude Oliva.

Après le meeting, de g à d: Edith Félix, Mariem Diop, Jean-Claude Oliva, Vassindou Cissé et Sylvain Piron

Il y a quelques semaines, nous avons fondé le collectif citoyen Écolos solidaires pour rassembler autour de l’écologie plutôt que de provoquer une division supplémentaire sous prétexte d’écologie. Les sondages actuels semblent bien montrer que cette stratégie est la bonne. Je prendrai deux exemples particulièrement significatifs qui traduisent une tendance plus générale. A Paris, EELV a obtenu près de 20% des voix aux élections européennes; son candidat est crédité de moins de 14% pour les municipales, en 4e ou 5e position. A l’inverse, à Bordeaux, EELV a obtenu 21,5% des voix aux européennes et sa candidate est créditée de 33% au municipales, au coude à coude avec le maire sortant. Dans le premier cas, à Paris, EELV en voulant tirer la couverture à soi, divise et tire toute la gauche vers le bas, ce qui ne lui réussit pas non plus. Dans le second cas, à Bordeaux, EELV joue le jeu du rassemblement à gauche (comme c’est le cas dans la plupart des villes du 93) et la victoire devient possible!

Pour Écolos solidaires, l’écologie, c’est des pratiques, plutôt que des discours ou des étiquettes. Voici un exemple particulièrement significatif. A Bagnolet, le Maire a stoppé -depuis 2017- la densification urbaine en refusant 34 projets immobiliers, représentant plus de 2000 logements supplémentaires et Tony Di Martino et la liste Bagnolet écologique et solidaire s’engagent à continuer dans cette voie. On ne retrouve pas la même clarté dans le programme de C. Laurence, pourtant estampillée EELV. On y parle de « stopper la densification débridée ». Et la densification tout court, alors? Ou encore de « maîtriser le développement urbain », sans doute avec les conseils des architectes avisés et des agents immobiliers qui l’entourent? Il s’agit là d’un discours creux, sans aucun engagement réel. Pourtant les Bagnoletais-es en ont assez des constructions, ils le disent, il faut les écouter et plafonner maintenant le nombre d’habitant-es de la ville!

A Bagnolet, quand on est un écologiste conséquent, contrairement à la chanson, on ne fait pas table rase du passé à chaque élection municipale. Au contraire, on fait table pleine des premières avancées obtenues au cours du mandat qui se termine -l’engagement fort du Maire et de la ville dans la bataille pour l’eau publique, le coup d’arrêt à la densification urbaine, le soutien à la bergerie des Malassis, …- pour aller plus loin. On ne vient pas se présenter aux élections une fois chaque trois ans, en faisant la soupe aux logos et aux egos. On agit sur le terrain dans la durée, on s’enracine!

Il ne faut pas se tromper d’époque. A Bagnolet comme ailleurs, l’enjeu n’est plus de faire une liste de témoignage en faveur de l’écologie. Ce train est passé depuis longtemps. Dommage que certains « écologistes » ne s’en soient pas aperçu! Il faut prendre acte de la conversion écologique sincère et profonde d’une grande partie de l’opinion et, bien entendu, de la gauche. La meilleure preuve m’en a été fournie par les assises citoyennes de « Bagnolet solidaire et durable » auxquelles j’ai participé. Les propositions qui sont sorties de ce public de la gauche locale, sont en grande partie les mêmes que celles que nous avions formulées en tant qu’écologistes. Aussi l’ordre du jour est maintenant de réunir les compétences et les talents des un-es et des autres pour constituer les équipes qui vont mettre en oeuvre le tournant écologique dans notre ville. C’est ce que fait la liste Bagnolet écologique et solidaire conduite par Tony Di Martino!