Cantines: l’alternative écologique

Enfin une alternative écologique à la malbouffe industrielle dans les cantines? C’est la question que pose une expérimentation menée à Romainville. Article de Hélène Haus dans Le Parisien.

À Romainville, des écoliers mangeront bientôt des plats bios et cuisinés sur place En septembre prochain, les élèves du groupe scolaire Maryse-Bastié à Romainville (Seine-Saint-Denis) auront des plats à base de produits bios et en circuit court concoctés au sein même de l’école par des agents municipaux.

Des bottes de carottes, des graines de sarrasin, du lait de coco ou encore du persil en pot. Autour de la table où sont posés tous ces produits, Isabelle Bretegnier explique aux agents de Romainville comment s’y retrouver « dans la jungle » des labels. « Il y en a plein qui existent mais ce qui est important, c’est que les denrées soient bios ou équitables », pointe cette diététicienne de la société coopérative d’intérêt collectif (SCIC) Nourrir l’Avenir, qui accompagne la commune de Romainville dans une petite révolution.

À la rentrée prochaine, les élèves du groupe scolaire Maryse-Bastié mangeront des plats préparés avec des produits bios et en circuit court (sauf pour les denrées cultivées uniquement hors de la métropole), cuisinés directement dans leur école.

Une expérimentation «qui va durer un an»

« Cette expérimentation va durer un an », détaille François Dechy, le maire écolo. Pour l’instant, les écoliers de Romainville sont nourris par la cuisine du Siresco, un syndicat intercommunal de restauration collective qui regroupe 19 communes franciliennes. Ses agents concoctent les repas des élèves du département à Bobigny. Ils sont ensuite transportés vers les établissements et réchauffés par les personnels municipaux dans des barquettes en plastique réputées pour renfermer des substances dangereuses, notamment des perturbateurs endocriniens très nocifs pour les enfants.

« Aujourd’hui, le repas qu’on sert aux élèves coûte une dizaine d’euros, mais la majorité des frais sont dus au transport, à la logistique et aux matières plastiques. Les matières premières ne reviennent qu’à 1,60 euro. En cuisinant des repas sur place, on va pouvoir réduire ces coûts annexes et acheter des produits non transformés, de meilleure qualité »,
décrit le premier édile, qui espère prouver que manger bio, local et surtout « fait maison » ne vaut pas plus cher. « On ne s’est pas lancés dans n’importe quoi, on a préparé cette expérimentation en amont, on a un budget à tenir », rappelle-t-il.

« Lorsque la cuisine est directement implantée dans l’école, on fait notamment des économies sur le gâchis, appuie Isabelle Bretegnier. Lorsqu’il y a un lien affectif avec le cuisinier, les enfants finissent davantage leur assiette. On fait aussi des économies en réduisant les apports en viande. Aujourd’hui, un repas dans une cantine classique couvre 300% des apports journaliers recommandés… Dans nos modèles
de repas, on passe également de cinq à quatre composants, c’est largement suffisant. »

Pour réaliser cette expérimentation, la mairie a symboliquement choisi une école située dans le quartier populaire de la cité Youri-Gagarine. « Les locaux y étaient aussi facilement aménageables », souligne Vincent Mercier, directeur de la petite enfance et de l’éducation à la mairie. Aujourd’hui, la plupart des écoles ne possèdent plus de cuisine. « Si l’expérimentation marche, on l’étendra aux autres établissements, mais cela nécessitera des aménagements », concède Élodie Girardet, maire adjointe à l’éducation.

Trois agentes y gagnent un emploi à temps plein

Ce test va aussi changer la vie des agentes. Trois d’entre elles, qui réchauffaient les plats, ont suivi une formation avec Nourrir l’Avenir pour devenir cuisinières. Elles seront sous la houlette d’un chef, spécialement recruté. « C’est beaucoup plus intéressant pour nous de cuisiner que de distribuer les plats. On apprend plein de choses, les enfants mangent mieux et, surtout, on va pouvoir avoir un emploi à temps plein alors que nous étions à temps partiel jusqu’ici », se réjouissent-elles.

À l’heure où de nombreuses villes souhaitent rouvrir des cuisines centrales — un lieu municipal dans lequel les agents cuisinent des plats qui sont ensuite redispatchés vers les établissements — ce modèle ne convainc pas François Dechy. « On retombe dans le même problème qu’ailleurs : des plats redistribués dans des barquettes, qui nécessitent de la logistique et des transports », note-t-il. Ce mode de fonctionnement va de plus être compliqué par l’interdiction des contenants en plastique dans les cantines scolaires qui entrera en vigueur le 1er janvier 2025. Les collectivités font devoir faire face à un véritable casse-tête pour les remplacer.

Cette expérimentation signe-t-elle la fin prochaine du partenariat entre Romainville et le Siresco ? « On présentera nos résultats au syndicat », précise François Dechy, qui est également vice-président délégué à l’innovation et à l’expérimentation au sein du syndicat.

« Je ne suis pas contre l’intercommunalité. Je pense que la coopération entre communes peut être utile. On pourrait, par exemple, imaginer  investir ensemble dans des terres agricoles », poursuit l’élu. « François Dechy étant vice président en charge de l’innovation, l’analyse de cette expérimentation sera utile à tous », commente, de son ccôté, Philippe Bouyssou, le maire (PCF) d’Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne) et président du Siresco.

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