Bagnolet pour un moratoire sur la 5G

A l’initiative des Ecolos solidaires, un vœu a été adopté par les groupes de la majorité et de l’opposition. Le Conseil municipal prendra aussi l’initiative d’organiser un débat à Bagnolet sur ce sujet. Lire la présentation de Valérie Bille et le vœu.

Cher.e.s collègues, cher.e.s Amishs

Désolée, je n’ai pas pu m’empêcher cette référence aux mots du président de la république, que j’ai ressenti personnellement comme méprisants.

La question se pose de savoir pourquoi le gouvernement veut imposer la 5G, quand on en connaît les différents impacts environnementaux et qu’on en ignore les impacts sanitaires.

La logique aurait voulue qu’il y eut une évaluation ET environnementale ET sanitaire préalable à la mise en œuvre du projet.

Le gouvernement prend donc les choses à l’envers, déploie la 5G et ensuite…on verra. Une évaluation sanitaire est envisagée pour 2021. Il n’y a pas d’évaluation environnementale prévue. 

Encore une fois, la charrue est mise avant les bœufs.

Mais la controverse sur ce type de grand projet est classique depuis 150 ans et je cite François Jarrige, maître de conférence en Histoire Contemporaine à l’Université de Bourgogne, qui poursuit : « à chaque fois que le gouvernement répond d’abord à des objectifs industriels et de profits à courts terme pour certains acteurs économiques, au dépens d’enjeux qui sont beaucoup plus importants et massifs comme l’environnement, l’écologie, les enjeux sanitaires et LE MONDE QUE L’ON VEUT CONSTRUIRE.

Dans les années 1860, beaucoup d’acteurs s’interrogeaient sur la pertinence de développer les machines à vapeur et l’industrie, en raison des pollutions et des pénuries de ressources qui étaient annoncées et c’est dans ce contexte là que des ingénieurs annonçaient que les progrès de la technique- dans le domaine des machines à vapeur- permettraient de résoudre les problèmes et qu’on aurait un système énergétique sans pollution !

C’est dans ce contexte-là qu’un économiste a forgé le concept d’effet rebond : l’idée que, certes, il y aurait une amélioration par unité de machine des rendements énergétiques, mais que globalement, la consommation ne cesserait d’augmenter.»

Et François Jarrige poursuit :

« C’est toute l’histoire de la société industrielle des cent cinquante dernières années : des promesses hors sol d’amélioration, des rendements qui se payent d’un accroissement global des pollutions, de l’extractions et des contaminations.

Comme dans les années 60/70 où les constructeurs automobiles expliquaient qu’AU DEBUT DU XXIème SIECLE, les automobiles ne pollueraient plus – grâce au progrès de la motorisation et des technologies. »

On voit bien où l’on n’en est aujourd’hui.

Sachant l’état actuelle des ressources de la Planète, pouvons-nous, devons-nous nous contenter des promesses hors sol et futuristes et mettre les questionnements et inquiétudes légitimes des citoyens sous le tapis ?

Je ne le pense pas.

Je vais vous lire à présent le vœu proposé par les élus de la majorité de Bagnolet.

Le vœu pour le moratoire sur la 5G

Considérant que le gouvernement a identifié la 5G comme un enjeu stratégique pour la France dans sa feuille de route et décidé que les fréquences seraient attribuées aux opérateurs téléphoniques dès septembre 2020. Cette décision intervenant sans étude d’impact climatique et environnemental ni aucune consultation publique préalable.

Considérant que le gouvernement ouvre les enchères pour l’attribution des fréquences 5G aux opérateurs téléphoniques le 29 septembre 2020 ;

Considérant que les premiers services commerciaux 5G devraient être lancés à la fin de l’année 2020 ou au début de l’année 2021 ;

Considérant que les émissions d’ondes de la 5G s’additionnent à celles des technologies antérieures, 4G, 3G et 2G, ce qui aboutira à une hausse du niveau d’exposition de la population aux ondes. Et qu’il faut s’interroger sur l’impact sanitaire de la multiplication d’objets hyper-connectés sur les populations humaines et sur la biodiversité ;

Considérant que plusieurs études1 démontrent que le déploiement de la 5G va augmenter significativement les émissions de gaz à effet de serre ainsi que la consommation énergétique. Ce déploiement en France aboutira à un ‘effet rebond’ par la hausse de la consommation de données et de l’usage des télécommunications, synonyme d’une très forte consommation d’énergie par la sollicitation des antennes et des serveurs ;

Considérant que le déploiement de la 5G va exponentiellement accélérer l’exploitation de ressources naturelles non renouvelables, la pollution due à l’extraction des métaux rares, et la génération de quantité de déchets pas ou peu recyclables. A l’heure actuelle, un très faible nombre de téléphones mobiles en circulation et en vente sont compatibles avec la 5G. Le déploiement de ce réseau mobile va donc impliquer un renouvellement d’une large part du matériel, augmentant encore l’empreinte écologique et le poids des déchets, et cela pour tenter de bénéficier d’une nouveauté technologique dont l’utilité reste à démontrer. Une étude d’impact environnemental préalable sur la 5G est donc nécessaire avant d’envisager son déploiement. ;

Considérant que le lancement de la 5G ne s’intègre actuellement dans aucune stratégie globale de sobriété numérique ;

Considérant dans ces conditions que le déploiement de la 5G semble incompatible avec les stipulations de l’Accord de Paris, de la stratégie nationale bas-carbone de la France et avec l’objectif de neutralité carbone en 2050 voulu par la ville de Bagnolet ;

Considérant que les citoyens doivent pouvoir s’approprier les débats concernant le déploiement de technologies qui conditionnent ensuite fortement leur mode de consommation individuel ;

Considérant que l’attribution des licences 5G n’a donné lieu à aucun débat démocratique que ce soit lors des élections présidentielles et législatives ou au Parlement alors que la 5G pose des questions écologiques, énergétiques, sociales et sanitaires ;

Considérant que la Convention citoyenne pour le climat s’est prononcée à 98% en faveur d’un moratoire sur le déploiement de la 5G qui constitue l’une de ses 149 propositions ;

Considérant que selon un sondage récent (Opinionway-mystartcab), 65% des Français souhaitent un moratoire sur la 5G ;

Considérant que l’attribution de fréquences aux opérateurs ne s’accompagne d’aucun dispositif permettant une réversibilité sur la base des usages constatés et de leurs conséquences sanitaires, énergétiques, sociales et environnementales ;

Considérant que nous ne serons pas maîtres de cette technologie, puisque les principaux constructeurs sont chinois (Huawei, ZTE) et américains (notamment des composants de Qualcomm, Intel et Cisco) pour installer les antennes de 5G. Et que la 5G servira surtout à accélérer le trafic de données provenant principalement de services étatsuniens – Facebook, Amazon, Google, Youtube, Netflix entre autres. 

Considérant que le déploiement massif d’objets connectés allant de pair avec la 5G participe de l’accaparement des données personnelles. Et donne ainsi les clefs d’un pouvoir de prévision et de contrôle social à des géants du numérique

Considérant que la technologie 4G n’est toujours pas totalement déployée, que les collectivités dépensent des sommes importantes pour équiper en fibre les espaces ruraux et des espaces mal desservis, l’arrivée de la 5G risque surtout d’aggraver les fractures numériques existantes. Nous nous interrogeons sur le rôle de la 5G et de l’Internet mobile dans la résorption de la fracture numérique. Nous souhaitons que les communes aient la capacité de choisir le mode d’accès à Internet et la maîtrise du développement des réseaux numériques.

Le conseil municipal de Bagnolet :

  • se prononce en faveur d’un moratoire sur le déploiement de la 5G, au moins jusqu’à l’été 2021.

  • demande le lancement d’études sanitaires et environnementales sur les effets de la 5G ;

  • prend l’initiative d’un débat démocratique décentralisé sur la 5G et les usages numériques ;

  • demande le droit à la subsidiarité pour les communes concernant l’application du principe de précaution.

1Par exemple, la mission d’évaluation du Sénat sur l’empreinte environnementale du numérique 2020 ; rapport pour « une sobriété numérique » The Shift Project 2018

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