À Bagnolet, en Seine-Saint-Denis, l’isolement des personnes âgées et la pauvreté ajoutent l’urgence humanitaire à la crise sanitaire. La municipalité s’est mobilisée pour distribuer repas et masques, en partenariat avec de nombreuses associations de quartier. Reportage d’Antoine Peillon dans La Croix.
Première partie: La ruche solidaire du centre Paul-Coudert
Le Centre communal d’action sociale (CCAS) de la ville de Bagnolet (93) et la Boutique de la solidarité, une épicerie offrant des produits de première nécessité, ont ouvert, dès le 19 mars, une « boutique solidaire éphémère » pour aider les habitants les plus précaires à passer l’épreuve supplémentaire du confinement. Installée dans le Centre Paul-Coudert, rue Hoche, qui abrite habituellement le service municipal d’animation pour seniors, le site est pris par la fièvre de l’urgence. Tri des produits, cuisine, préparation de dizaines de paniers-repas dans des sacs en papier, décompte des masques, reçus le jour même, pour organiser les premières distributions dans la commune, répartition des chèques-service, reçus la veille. Toutes les personnes présentes témoignent spontanément de l’engagement, sans hésitation, de Malika Haddar, directrice générale du CCAS de Bagnolet dans l’initiative, dès le 17 mars, premier jour du confinement général (…)
Une municipalité humanitaire
Le 3 mai, à 15H50, Tony Di Martino, maire de Bagnolet (93), annonçait, sur sa page Facebook, une « distribution par la Ville de 2 masques ’’grand public’’ lavables et réutilisables aux Bagnoletais.e.s en âge de les utiliser » à partir du mardi 5 mai, « dans une double logique de protection de l’ensemble des habitants et d’anticipation du déconfinement à venir ». Il rappelait que « les Seniors et/ou personnes vulnérables isolées bénéficient d’ores et déjà de livraisons à domicile par des équipes dédiées et ce, depuis jeudi dernier (le 30 avril) ».
Jérôme Guyot, bénévole des Marmoulins de Ménil’, pose volontiers devant un véhicule de la Ville de Bagnolet. © Antoine Peillon (Ishta)
Le 15 mai, la municipalité de Bagnolet informait ses administrés que, « dans le cadre du déconfinement progressif, la Ville adapt(ait) le dispositif de soutien aux personnes en difficulté ». Ainsi, la boutique de la solidarité reprenait dès lors « ses activités habituelles avec le soutien logistique de la Ville et du CCAS, après nettoyage et désinfection », tandis que « les associations caritatives historiques, les collectifs citoyens et les acteurs de la solidarité poursuivaient leurs activités selon leurs modalités habituelles et dans le respect des préconisations sanitaires en vigueur ».
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Deuxième partie: Les jeunes de La Noue au secours des « invisibles »
Alors que le taux de pauvreté est déjà de 30,8 % à Bagnolet, il atteint 65 % dans le quartier de La Noue, selon la Chambre régionale des comptes (1), nécessitant une action humanitaire spontanée. L’aide alimentaire s’est organisée, dès le début du confinement, autour d’Alhassane Diallo, 41 ans, animateur de la Recyclerie de La Noue, du centre Toffoletti et de l’association Temps libre à Bagnolet…
« Cela fait trente ans que j’habite là et je vais bien… » Nadine Duteriez, 60 ans, assistante de la direction du CCAS de Bagnolet, s’insurge avec humour contre la « mauvaise réputation du quartier » qui serait « dangereux ». « Mes enfants ont grandi ici, avec beaucoup d’enfants venus de loin. C’est ça, le charme de la Seine-Saint-Denis », poursuit-elle. Ce midi, elle est venue saluer les jeunes de La Noue rassemblés sur la pelouse, devant l’Algeco du centre social et culturel Toffoletti qui se consacre, habituellement, à l’accompagnement scolaire du CP à la terminale, aux cours de langues (français, mandarin, arabe littéraire), mais aussi à la danse hip-hop, la zumba, la salsa, la couture, la mosaïque, les échecs, la réparation des vélos…
© Antoine Peillon (Ishta)