Dans un essai incandescent consacré au « gaslighting », cette technique de manipulation par le discours, Hélène Frappat, philosophe et romancière revient aux origines de la notion : le film de George Cukor « Gaslight » devient la matrice de l’étude de « l’art de faire taire les femmes » et de ce qui nous arrive politiquement aujourd’hui. Par Lise Wajeman dans Mediapart.
. Le mot s’est répandu depuis la présidence de Trump. Il fait partie de ce nouvel arsenal de termes et expressions, comme « post-vérité », « fake news », « faits alternatifs », avec lesquels on peut tenter de nommer cette réalité très particulière que veulent produire les nouveaux autocrates.
Gaslighting a été élu mot de l’année par le dictionnaire Merriam Webster en 2022, qui le définit ainsi : « acte ou pratique consistant à induire quelqu’un totalement en erreur, surtout à des fins personnelles ». Mais on ignore souvent que le mot vient du cinéma, de Gaslight, film de George Cukor, avec Ingrid Bergman et Charles Boyer. Dans Gaslighting, Hélène Frappat rayonne depuis le film pour observer les manières dont on fait taire les femmes et voir comment elles peuvent reprendre voix.
Cet essai lumineux fait penser les fictions et montre comment elles nous parlent de notre monde. Des femmes réelles ou imaginaires – Ingrid Bergman, Cassandre, Alice au pays des merveilles… – constituent autant de figures qui éclairent une réflexion à la fois politique et esthétique.