11-0 : le maire battu à plates coutures au conseil municipal!

Au conseil municipal de Bagnolet, le maire a présenté quatre délibérations pour démettre les adjointes qui ont voté contre le budget et sept délibérations pour les remplacer dans différents organismes. Mais il a été battu sur toute la ligne: toutes ses délibérations ont été rejetées par 18 voix contre, 7 abstentions et seulement 14 pour! Un maire qui est mis en minorité sur onze délibérations successives (un record!) devrait en tirer les conclusions et démissionner. Ci-dessous les interventions des élu.e.s de notre groupe.

L’intervention de Jean-Claude Oliva

Je voudrais tout d’abord remercier sincèrement Edouard Denouel et son groupe pour leur franchise et leur sens des responsabilités. Nous ne sommes pas d’accord sur tout, c’est de notoriété publique, mais nous pouvons nous retrouver pour l’essentiel.

Sur la forme, une première remarque. Ce n’est pas la première fois qu’Elhame Chair et Edith Félix se voient retirer leurs délégations. Pour Edith, c’est la troisième fois! Les autres fois, il n’y a pas eu de passage au Conseil municipal… Qu’on ne vienne pas nous dire que c’était un retrait temporaire, le retrait temporaire n’existe pas dans le code des collectivités. D’ailleurs, il a fallu que le Maire prenne un nouvel arrêté pour leur redonner leurs délégations. Si le maire répond à une obligation légale aujourd’hui, cela signifie que les autres fois, le maire était dans l’illégalité. Sur le fond maintenant.

Nous n’avons pas l’intention de démissionner et nous voterons pour le maintien de nos adjointes. Pourquoi ?

Nous avons voté contre le budget et nous critiquons la gestion brutale du maire qui ne cherche pas à construire à partir des opinions différentes mais qui veut imposer ses décisions arbitraires par tous les moyens. Même quand elles avaient encore leurs délégations, le plus souvent, nos adjointes n’avaient pas les informations nécessaires, le maire signait des documents dans leur dos, elles étaient systématiquement court-circuitées. Bien entendu, ce système ne fonctionne pas, tout coince à la ville de Bagnolet car toutes les décisions doivent passer par le maire, tout est retardé, tout est long, cela nuit à l’efficacité de l’action municipale. Et les décisions du maire ne servent pas Bagnolet mais lui servent à durer.

Et nous ne sommes pas les seuls à avoir ce sentiment. Même si nos collègues de Bagnolet en commun ont voté pour le budget, j’ai bien entendu qu’ils partagent les mêmes critiques que nous sur la gestion du maire.

Dans ces conditions, accepter la perte de nos adjointes reviendrait à donner une prime à celui qui est le principal responsable de la division et du naufrage de la majorité de gauche et écologiste de 2020.

Il n’est pas vrai que le maire et son groupe représentent à eux seuls la majorité de 2020. Cette majorité n’existait qu’avec nous, les Écolos solidaires, avec Elhame et Hamid Chair qui ont quitté le groupe du maire pour former avec nous le groupe Écolos solidaires, citoyen.ne.s et radicaux, avec Anne Gerval qui était dans le groupe du maire, avec le premier adjoint Olivier Taravella qui a démissionné du conseil municipal, il y a deux ans et, bien entendu, avec le groupe Bagnolet en commun, avec lequel nous nous étions alliés pour le second tour.

Sans légitimité démocratique, sans réelle majorité, un maire responsable en tirerait les conclusions et démissionnerait.

Comme vous le savez, notre groupe est particulièrement attaché à l’union des gauches et des écologistes qui sont trop divisées et depuis trop longtemps dans notre ville. En 2020, pour contrecarrer cette tendance à la dispersion, nous nous étions alliés dès le premier tour au maire, en espérant créer un mouvement plus large. Nous avons hélas pu constater tout au long du mandat que le maire était un puissant facteur de désunion des gauches et des écologistes. Aussi nous souhaitons son retrait lors des prochaines échéances municipales pour que l’union la plus large des gauches et des écologistes redevienne possible ! Nous allons prendre de nouvelles initiatives dans ce sens.

Concernant le remplacement de nos élu.e.s dans différents organismes (conseils d’école, etc)

Il n’y avait aucune obligation légale qui justifie cette demande, contrairement au titre d’adjoint.

Il s’agit d’une tentative de prise de pouvoir de la minorité municipale du maire.

Cela ne va pas dans le sens du bon fonctionnement de l’administration communale. En effet, actuellement il est déjà bien difficile d’avoir un élu.e qui assiste à chaque conseil d’école. Et on voudrait en cumuler encore sur les élus restants du groupe du maire. En conséquence, nous voterons aussi contre ces délibérations.


L’intervention d’Hamid Chair

Il y a des conseils municipaux où l’on débat d’idées, de projets, d’avenir. Et puis il y a ceux où au lieu de construire, on cherche à punir politiquement des élus qui ont osé exercer leur liberté de vote, leur liberté de conscience, en refusant un budget que nous estimions insincère, déséquilibré et dangereux pour l’avenir de notre commune et je ne vais pas revenir sur mon analyse lors du vote du Budget.

Oui, nous avons voté contre le budget. Et cela ne vous a manifestement pas plu, Monsieur le Maire cher Tony Et pour nous faire payer notre indépendance, vous avez décidé, seul dans votre bureau, d’abroger nos délégations le 7 avril 2025 dans l’intérêt de la bonne marche de l’administration sauf à nous dire lors du dernier conseil municipal de bien vouloir démissionner et Pire encore avant même que le Conseil municipal ne se prononce, vous avez fait éditer une nouvelle affiche institutionnelle excluant les élus concernés, en nous reléguant dans « l’opposition », comme si vous étiez seul à décider qui est dans la majorité ou non.

Je me permets ici de vous rappeler quelques principes juridiques fondamentaux.

La jurisprudence du Conseil d’État (notamment l’arrêt du 16 juin 1995, n°117161) est constante sur ce point : la fonction d’adjoint est indissociable de l’exercice effectif d’une délégationMaintenir un adjoint sans délégation revient à dénaturer son rôle, contourner les textes, et détourner l’esprit de la loiC’est un abus de pouvoir manifeste.

De plus, pendant que certains conseillers municipaux, eux, se voient confier des délégations actives il est juridiquement inacceptable de laisser des adjointes au maire sans aucune délégation, Cela va à l’encontre du principe d’égalité entre les élus et du fonctionnement normal de l’exécutif local.

En conséquence, maintenir cette situation reviendrait à entretenir une illégalité flagrante, à affaiblir le fonctionnement démocratique du Conseil municipal et à manquer de respect au suffrage universel qui nous a élus.

Je vous le dis calmement vous n’êtes pas le propriétaire des mandats des élusVous n’avez pas le droit de confisquer les écharpes, car ces écharpes ne vous appartiennent pas. Elles appartiennent aux Bagnoletais qui ont élu ces 4 femmes pour un mandat de six ans. Vous n’avez pas le droit de les traiter comme des parias pour avoir eu le courage de vous dire « non ».

D’ailleurs, cette question du « maintien » dans les fonctions d’adjointe au maire est d’une hypocrisie rare. Vous écrivez dans la note du conseil, je cite : « Maintien ou non de Madame dans ses fonctions d’adjointe », alors même que vous avez déjà acté leur mise à l’écart. Vous ne nous demandez pas un vote, vous exigez une sanction

Mais moi, je vous pose une autre question : en quoi le retrait de ces délégations ou de l’écharpe nuit-il ou pas au bon fonctionnement de la municipalité ? Depuis le retrait, ils ont continué à siéger en commission, à faire les astreintes, à célébrer les mariages, à représenter la Ville dans les conseils d’école… Parce que je vous rappelle qu’elles ne sont pas là pour une indemnité. Mais pour les Bagnoletais. Et elles continuerons à l’être, avec ou sans votre approbation.

À celles et ceux qui s’apprêtent à voter cette exclusion, je vous le dis regardez bien ce que vous validez. Vous validez une dérive autoritaire. Une atteinte à l’équilibre démocratique

Je tiens à souligner, par ailleurs, que les adjointes visées par cette procédure sont toutes des femmes. Est-ce un hasard ? Peut-être. Mais dans une République qui se veut égalitaire, où l’on milite pour la parité, la reconnaissance des femmes en politique ne peut se réduire à leur exclusion silencieuse dès lors qu’elles affirment leur autonomie. Ces femmes ont été élues, investies, engagées. Et leur mise à l’écart, suite à un vote contre le budget constitue une atteinte non seulement à la démocratie, mais aussi à la reconnaissance légitime de leur engagement public. Ce Conseil devrait être le lieu de l’exemplarité, pas celui du recul en matière de représentation féminine.

Enfin, sachez que les élus visés par cette procédure injuste, n’ont aucune intention de céder à la pression ni de quitter leur place. Et si vous continuez dans cette voie, nous pouvons faire une demande pour mettre à l’ordre du jour, le moment venu, la question du maintien du maire lui-même dans ses délégations de fonction bien sur vous garder les principales délégations comme le pouvoir de police, l’état civil et la gestion du personnel, mais sachez que nous avons, nous aussi, le pouvoir d’initier un vote contre vous.

Je tiens à vous rappeler l’exemple de la commune de Crosne dans l’Essonne, où le Maire de la ville, Monsieur Michaël DAMIATI a été privé de ses délégations par le conseil municipal. Contesté par les élus en raison de son exercice solitaire du pouvoir, il a perdu ses délégations à la suite du Conseil municipal du 24 juin 2024, car une délibération a été inscrite à l’ordre du jour à la demande d’un tiers des élus du conseil municipal.

Cela montre bien qu’il n’y a pas que vous qui pouvez retirer des délégations comme bon vous semble. Le respect des principes démocratiques et de la collégialité est essentiel dans l’exercice de nos fonctions, et il est primordial de ne pas en abuser.

Ce Conseil municipal marquera une étape. Celle où des élus debout auront rappelé que la démocratie locale ne se résume pas à obéir au chef, mais à servir les Bagnoletais.


L’intervention d’Edith Félix

Puisque le maire veut me retirer le statut d’adjointe, et tant qu’il ne m’a pas encore retiré la parole, je vais au moins une nouvelle fois la prendre. Cher.es Bagnoletais.es, Chers Bagnoletais, vous avez entendu que ma tête devait tomber, que j’ai été empêchée pour mener la politique municipale. Le responsable principal c’est celui qui anime l’équipe municipale, le maire.

J’ai été élue dans une équipe municipale pour apporter un soutien actif au maire afin de mener une politique écologique et solidaire. J’ai été investi.e d’une délégation aux Transports, aux Mobilités, à la Voirie, et à l’Eau dans la ville. Le volet transports et mobilité est le volet déterminant d’une politique sociale pour l’accès de tous à la mobilité, et pour un environnement plus sain pour toutes et tous, y compris celles et ceux qui ne choisissent pas leur lieu d’habitation, par exemple en bordure de la A3. Le reste de la délégation est fondamental pour transformer l’espace public, encore une fois pour un espace plus sain, plus vivable, plus arrosé et plus frais, et mieux adapté aux nouvelles mobilités.

Être élue déléguée, c’est comprendre la direction politique énoncée en début de mandat sur un secteur particulier. C’est incarner avec le maire une volonté politique de la déployer, et c’est cette volonté qui permet de déclencher, d’entraîner l’action et dépasser les difficultés. Et c’est aussi connaître le territoire, ou les acteurs de la ville, pour articuler avec opportunité les grandes lignes de la politique sur des projets concrets. C’est être en relation avec un ensemble d’autres acteurs extra muros, partenaires des politiques publiques, le département, IDFM…. C’est enfin servir les habitant.es, les écouter, les associer aux nouveaux enjeux de transition écologique pour les faire participer aux décisions et projets qui ont lieu pendant le mandat.

Assez vite, j’ai senti qu’il n’y avait pas chez le maire de volonté pour une politique écologique, ni intérêt d’ailleurs, ni compréhension des enjeux sur le terrain. Lors de la réfection de la rue Graindorge, il m’a fallu beaucoup d’efforts pour faire valoir l’intérêt d’une transformation écologique de l’espace public, et pour éviter la réfection de la rue à l’identique, comme prévu par le plan initial. Sur l’impasse de la Dhuys, je n’ai pu éviter une réfection classique, toute d’asphalte, sans ajouts de dispositifs pour la prise en compte des ruissellements d’eaux pluviales, et comme attendu, les riverains en contrebas ont rapidement été inondés : il a fallu refaire des aménagements ultérieurement.

J’ai insisté pour la création d’un Comité Vélo Mobilité Douces. L’engouement pour le vélo avait pourtant permis de créer une belle dynamique dès mi 2021 : réunions régulières, initialisation d’un Plan Vélo, plans proposés pour une piste cyclable avenue Gambetta.

Le plan vélo développé par un prestataire est dans un placard car aucun plan d’action n’y a été joint. Le maire m’a interdit de prendre contact directement avec le département ou toute autre organisation hors de la ville, mais ne prend pas en charge ce dialogue pourtant nécessaire. Bref, nous sommes en 2026 et les travaux commencent tout juste avenue Gambetta. Le Comité Vélo est mort.

Avec Ile-de-France Mobilités, ça n’avance pas fort. Le maire interdit à l’élue une relation directe, ne répond souvent pas à ses sollicitations, se contente d’écrire des courriers sans suivi ni réunion de travail.

Il faut dire aussi que je suis déléguée intermittente. Ce serait comique si ce n’était dramatique. Le maire m’a retiré trois fois mes délégations : entre 30 septembre 2023 et le 30 octobre 2023, puis entre le 9 mars 2024 (eh oui, 9 mars, ça vous dit quelque chose?) et le 15 septembre 2024. Puis à nouveau depuis le 8 avril 2025.

Cela n’a pas aidé. Par exemple, pour les signatures, dès les premières vacances scolaires, je ne figurais plus comme signataire des arrêtés de voirie, j’étais simplement incluse dans le circuit de signature.

Au fil des arrêts et reprises, je ne figurais même plus dans le circuit de signature. Mais à quoi bon ?

Le retrait de délégation intervient à l’initiative du maire, à tout moment, mais il ne doit pas être inspiré par un motif étranger à la bonne marche de l’administration communale.

Or la principale entrave, ici, c’est de priver les élu.es délégués de moyens de suivre et de faire progresser la politique municipale. C’est d’oublier de mener une politique dans la seule optique de durer. Ce sont des réflexes pour garder le pouvoir, mais qui portent préjudice à l’ensemble des Bagnoletais.es. Nous avons vu les entraves. Nous les avons dites. Maintenant, il faut aller chercher de nouvelles personnes capables de porter de nouvelles façons travailler, de porter une politique municipale et d’y associer les habitant.es.

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