Municipales: ce qui se cache sous la «vague verte»

Les écologistes ont remporté le 28 juin sept des quarante plus grandes villes de France. Ce succès inédit ouvre-t-il une nouvelle ère politique ? Réponse en six questions. Par Pauline Graulle dans Mediapart. Extraits.

Dimanche 28 juin, vers 22 heures : les nouveaux maires fêtent la victoire dans leurs villes. Les cadres nationaux, eux, se sont rassemblés dans leur QG d’un soir, un bar branché situé au bord du canal de l’Ourcq, dans le XIXe arrondissement de Paris. Les mines sont marquées par l’épuisement, mais heureuses. Les villes tombées dans l’escarcelle écolo ont été annoncées au compte-gouttes tout au long d’une soirée riche en suspense : à la surprise générale, Strasbourg, Bordeaux, et Poitiers sont passées chez les Verts après des duels ou des triangulaires très serrées.

Alors qu’Europe Écologie-Les Verts (EELV) détenait une seule ville de plus de 100 000 habitants (Grenoble), le parti gérera dorénavant sept grandes villes – Grenoble, Strasbourg, Bordeaux, Annecy, Besançon, Lyon, Tours – ainsi que la puissante métropole de Lyon.

À Marseille, la cheffe de file de la gauche et des écolos Michèle Rubirola, qui espère l’emporter samedi, jour du « troisième tour »est certes une ancienne d’EELV, mais elle n’avait pas été soutenue par son ancien parti au premier tour (le mouvement écolo avait présenté un autre candidat).

Après les larmes de joie, après le soulagement, et une grosse déception (Toulouse, restée à droite), ce 28 juin au soir, une certaine prudence a gagné les troupes écolos : « Vu l’abstention très forte, les nouveaux maires vont devoir s’accrocher », glisse à ses camarades la sénatrice Esther Benbassa, pour souligner l’assise bien fragile de cette nouvelle génération qui vient d’accéder aux manettes.

Tout reste à faire, donc, après le dénouement de ces municipales que beaucoup jugent « historiques ». En attendant, une foule de questions se posent pour tenter de « faire parler » ce scrutin moins univoque qu’il n’y paraît.

(…)

  • La vague est-elle uniquement « verte » ?

Est-ce une victoire des écologistes, ou de la gauche en général ? D’un côté, il apparaît clairement que les écologistes victorieux ne sont que la face émergée d’un iceberg très « gauche plurielle ». Partout ou presque, les listes qui l’ont emporté ont en effet mélangé écologistes, communistes, socialistes, Insoumis et citoyens.

C’est le cas, de façon emblématique, à Marseille, où Michèle Rubirola a été portée, dès le premier tour, par le socialiste Benoît Payan, l’Insoumise (suppléante de Jean-Luc Mélenchon) Sophie Camard et les communistes locaux. Même schémas à Tours : la liste qui a envoyé l’écologiste Emmanuel Denis à l’hôtel de ville rassemblait dès le premier tour le PS, le PCF, Génération·s, les Insoumis, et des citoyens non encartés.

Reste que si le « total gauche » demeure, sur les villes de plus de 30 000 habitants, quasiment équivalent à 2014 (environ un tiers), la progression des Verts en nombre d’habitants concernés, comme le maintien du PS, compensent le recul du PCF qui continue sa décrue historique et perd ses villes phares : même s’il gagne Corbeil-Essonnes (91) ou Bobigny (93), et voit réélire triomphalement dès le premier tour le maire de Montreuil, Patrice Bessac, les communistes échouent à Saint-Denis et Aubervilliers (93), Choisy-Le-Roi et Champigny (94), ainsi qu’à Arles et à Saint-Pierre-des-Corps.

En définitive, la victoire des Verts est peut-être plus encore culturelle qu’électorale. Le PS, qui s’est maintenu à Paris, Nantes, Rennes ou qui gagne Nancy, l’emporte ainsi sur des thématiques écologistes. Fait notable : sur les bulletins parisiens d’Anne Hidalgo, le logo EELV apparaissait en plus gros que celui du PS, et la couleur verte mangeait tout l’espace.

Autre indice que l’écologie est la nouvelle martingale : à Lille, Martine Aubry, qui l’a emporté sur le fil (quelque 200 voix) face au candidat vert Stéphane Baly, a juré, au soir du second tour, avoir entendu « encore plus fort, le message partout en France sur la nécessité de cette transition écologique ».

Un air du temps qui impose des thèmes écologistes, mais aussi un parti écolo qui n’a jamais été aussi visible : jadis supplétif du PS, EELV semble être devenu un acteur incontournable, voire moteur à gauche. Vanessa Jérome résume le tout en un « en même temps » stratégique : « Le combo gagnant, c’est la gauche avec les Verts et les Verts devant la gauche. »

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