Plaidoyer pour les forêts d’Île-de-France

Un collectif régional constitué d’associations, d’unions, de fédérations locales et de personnalités lance un appel pour la préservation des forêts dans la région Île-de-France.

Le constat

Les forêts urbaines sont indispensables à la santé des franciliens

Poumons verts autour de Paris, les forêts d’Ile-de-France permettent de multiples activités récréatives et contribuent au bien-être ainsi qu’à la bonne santé physique et mentale des franciliens. Très fréquentées, avec plus de cent millions de visites annuelles, les forêts publiques ont une importance cruciale pour la qualité de vie des habitants concentrés dans des villes très minérales et polluées. En été, durant les canicules, elles atténuent les dômes de chaleur.

Les forêts franciliennes sont trop rares et trop petites

La région Ile-de-France est à la fois une des plus petites et la plus peuplée de France. Ses forêts couvrent 23 % du territoire régional à égalité avec sa surface urbanisée. Les deux tiers d’entre elles sont privées et très morcelées, le tiers restant étant constitué de forêts domaniales ou appartenant à des collectivités. Rapportée au nombre de franciliens, la surface de forêt par habitant est onze fois moindre que celle de la France métropolitaine.

Les forêts franciliennes sont en danger

Le changement climatique les affaiblit par des sécheresses et des vagues de chaleur de plus en plus intenses. A cela s’ajoute une exploitation trop importante pour les forêts domaniales, ce qui les expose davantage aux effets du climat et des ravageurs (insectes, champignons, etc) qui profitent de la vulnérabilité accrue des arbres.

Pourtant elles sont indispensables

Les forêts contribuent activement à la filtration de l’air et à la régulation des cycles hydrologiques. Elles offrent des surfaces d’infiltration et de filtration pour les précipitations, limitant les phénomènes de ruissellement, en garantissant la ressource en eau des franciliens. De plus, ces forêts sont souvent les derniers refuges pour de nombreuses espèces animales et végétales, fortement touchées par l’avancée de l’urbanisation et le fractionnement de leur habitat.

Le bois énergie n’est pas une énergie vertueuse

Deux millions de franciliens se chauffent au bois mais la récolte régionale ne fournit que 16 % de la demande. L’hiver, ce chauffage émet autant de particules nuisibles à la santé que l’ensemble du trafic routier francilien et 2,7 fois plus de gaz à effet de serre que le chauffage au gaz naturel. Le chauffage au bois en Île-de-France est donc loin d’être vertueux. La France a été condamnée par la cour européenne pour la mise en danger de sa population par une mauvaise qualité de l’air, sanction accrue par le Conseil d’Etat condamnant notre pays à payer 10 millions d’euros chaque semestre aux agences nationales spécialisées dans la prévention de l’atmosphère.

L’urgence d’un statut adapté aux forêts d’Ile-de-France

Les responsables locaux ne prêtent pas suffisamment attention à la protection des forêts publiques, les plus exploitées et les plus fréquentées, dans une région où la richesse des forêts ne réside pas seulement dans la valeur du bois. La reconnaissance des fonctions vitales telles que la séquestration du carbone, la régulation du climat, la qualité de l’air et de l’eau, la biodiversité ainsi que l’apport à la santé publique devraient permettre à l’Office National des Forêts (ONF) de compenser la réduction des revenus issus de la production de bois, tout en répondant aux attentes sociétales en termes de durabilité et de qualité de vie.

Les propositions

La gestion forestière doit sauvegarder la forêt et ses écosystèmes

Les forêts urbaines et péri-urbaines d’Ile-de-France sont les derniers refuges d’une biodiversité en voie d’extinction. Elles doivent faire l’objet de mesures de conservation renforcée, par l’application de l’article 212-2 du code forestier, qui dans le cadre de la multifonctionnalité impose la priorité de la préservation et de l’amélioration du cadre de vie des populations, dans les forêts soumises à une forte fréquentation du public. Ceci doit s’inscrire dans une sylviculture axée sur la conservation des écosystèmes et la captation du carbone.

Le chauffage au bois ne doit pas être encouragé

La combustion du bois émet dix fois plus de particules fines que le charbon, et plus de gaz à effet de serre. Les aides aux installations de chauffage au bois, qu’elles soient collectives ou individuelles, doivent être supprimées et les nouvelles installations en zones densément peuplées interdites.

L’isolation des bâtiments doit être la priorité de la politique énergétique. Il faut favoriser l’utilisation des bois d’éclaircies et résidus de scierie dans l’élaboration de produits de longue durée de vie, de construction ou d’isolation, permettant un stockage du carbone.

Les forêts domaniales sont vitales pour les Franciliens

Les forêts domaniales franciliennes remplissent des fonctions vitales, là où vit près de 20 % de la population nationale sur 2 % du territoire. Les objectifs de productivité excessifs du programme régional forêt-bois entraînent leur surexploitation. Ces forêts domaniales sont un véritable bien commun. Elles doivent bénéficier d’un statut propre qui protège tous les services qu’elles rendent aux populations, directement ou indirectement.

L’ONF ne doit pas dépendre de la vente du bois

Les forêts publiques d’Île-de-France sont gérées par l’ONF. Son statut d’établissement public de caractère industriel et commercial lui impose de s’autofinancer par la vente de bois. L’exploitation du bois ne doit plus constituer une ressource financière nécessaire. 

Alors que la valeur du bois coupé est dix fois moins importante que la valeur estimée des autres fonctions de la forêt (stockage de carbone, purification de l’eau, de l’air, biodiversité, loisirs…) les aménités positives de la forêt doivent être intégrées au budget de l’ONF, financées par les collectivités publiques. Il faut par ailleurs augmenter le budget des missions d’intérêt général de l’ONF.

La gouvernance de la forêt doit intégrer toutes les composantes de la société. Le code forestier français consacre la forêt comme bien commun. La société civile doit avoir accès sans restriction à l’information, et disposer d’un droit de regard sur la gestion des forêts publiques. Des instances de concertation et de décision indépendantes, incluant l’ONF, avec une représentation des associations, des collectivités locales et des experts scientifiques, doivent être mises en place afin de permettre une gestion plus transparente et participative des forêts.

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