Le jardinage, passion nationale, réunit plus de 17 millions d’adeptes. Dans la panoplie du jardinier, les toiles de paillage vertes ont fait une entrée fracassante. Ici et ailleurs, elles semblent être la solution pour les plantations du futur. Se méfier des apparences, l’usage de ce plastique annonce des catastrophes. Par Alain Dugrain-Dubourg dans Charlie-Hebdo. Comme dans le cas des pelouses hybrides, sur lequel nous reviendrons, la pollution des sols par les plastiques est un fléau.
Vous les avez obligatoirement déjà vues. Insidieusement, au hasard d’un chemin ou d’une rue, mais vous n’y avez pas forcément prêté attention. Pire, vous avez peut-être pensé que c’était une bonne chose pour la biodiversité. Je veux parler de ces bâches rampantes, croissantes, envahissantes qui fleurissent partout où il convient de préserver le sol. Les spécialistes de l’aménagement parlent de « toile de paillage tissée plastique » pour désigner ce revêtement constitué de fils polypropylène (un polymère de propylène) issu du pétrole.
Depuis les années 1990, cette toile tissée au ton vert a succédé à la bâche noire imperméable en polyéthylène. Une bonne chose a priori. La toile résisterait davantage au temps, préserverait l’humidité et limiterait les plantes adventices, en d’autres termes « les mauvaises herbes ». Au nom du progrès, les particuliers, comme les collectivités ou les entreprises, se sont précipités sur ces produits avec la bonne conscience d’une action vertueuse.
C’est cette démarche croissante qui a alerté puis inquiété Jean-François Louineau, naturaliste de longue date et conseiller expert en transition de la Région Nouvelle Aquitaine : « Je n’hésite pas à le dire, ce phénomène va générer l’une des plus graves pollutions au plastique de ce début de siècle. Une vraie bombe à retardement. Il faut en finir d’urgence. » Un cri d’alerte qui se justifie lorsqu’on y regarde de plus près.