Pour un monde débarrassé de ses toxiques. Samedi 15 mai, à Paris et dans plus de quinze villes, aura lieu une marche pour protester contre le système agrochimique et pour faire advenir un modèle agricole capable de nourrir l’humanité sans la détruire.
Le 15 mai, des citoyen·nes se rassembleront dans plusieurs villes de France pour manifester contre Monsanto-Bayer et contre le système agrochimique qu’incarne la firme. L’ensemble des multinationales du secteur manipulent et empoisonnent le vivant. C’est dans une véritable logique de prédation que ce système s’attaque à notre monde. Ainsi, depuis 2013, des dizaines de villes dans le monde se mobilisent chaque année pour réclamer un autre modèle d’agriculture. Ce sera donc le rendez-vous donné par la société civile pour obtenir la fin du système agrochimique et la justice pour tou·tes !
Un empoisonnement du vivant qui s’appuie sur les inégalités et les nourrit
Le secteur agrochimique est l’un des responsables du monde toxique dans lequel nous vivons. Suite à leur utilisation guerrière et coloniale, les produits chimiques sont devenus la base même d’un modèle agricole imposé par les firmes. Pesticides de synthèse et engrais azotés sont autant de contaminants dont la présence dans les milieux et organismes est toujours plus importante et ce, pour le long terme. Les impacts environnementaux et sanitaires de ce modèle sont désastreux : disparition des insectes notamment pollinisateurs, pollution des eaux, des sols, de l’air, cancers, malformations congénitales… L’ensemble du modèle agroalimentaire est aussi responsable de plus d’un quart des émissions mondiales de gaz à effet de serre – du fait par exemple de la déforestation massive, de l’élevage industriel, des engrais de synthèse.
Cet empoisonnement du vivant ne peut être compris sans penser les inégalités mondiales entre les pays du Nord et ceux du Sud. Face à des systèmes agricoles et alimentaires mondialisés, marqués par le rôle des marchés internationaux, une concentration accrue dans les mains de quelques acteurs privés, et des soutiens publics sans faille aux investissements privés, les paysan·nes du Nord au Sud sont aujourd’hui les premier·ères touché·es. Certains territoires sont identifiés comme de nouveaux marchés pour diffuser OGM et autres intrants chimiques comme c’est le cas en Afrique subsaharienne. Sous la pression des lobbys, la France et plus globalement l’Union européenne autorisent encore aujourd’hui l’exportation de pesticides pourtant interdits d’usage sur leur territoire !
Enfin, ces inégalités ne peuvent être comprises sans penser au racisme environnemental : les populations du Sud ainsi que les populations racisées – y compris au Nord – sont les plus victimes des produits et pratiques des multinationales, allant jusqu’à la violation des droits humains et des droits des peuples autochtones.
Nous nous mobilisons donc afin d’exiger justice et réparations pour toutes les populations victimes des poisons de l’agrochimie, et notamment celles qui en sont disproportionnellement affectées selon des logiques liées au capitalisme, au racisme, au sexisme, ou à des rapports (néo) coloniaux. N’oublions pas que les premier·ères touché·es sont les agriculteur·trices et autres utilisateur·trices de ces pesticides. Il est nécessaire de les dépister, de reconnaître leurs pathologies comme maladies professionnelles, d’indemniser toutes les victimes, dont les riverain·es exposé·es, de décontaminer les sols ou encore de promouvoir la recherche sur la toxicité des produits.
Mettre fin à la complicité politique du système
Le 17 avril, malgré le succès de la Convention citoyenne pour le climat, le gouvernement français a refusé de reconnaître le crime d’écocide dans la loi «climat et résilience», refusant un arsenal juridique à la hauteur de la destruction du vivant. L’impunité protège toujours ceux qui compromettent la viabilité de notre planète.
Ce monde toxique que nous dénonçons ne prospère que grâce aux politiques qui le maintiennent – comme l’attestent la réintroduction des néonicotinoïdes, l’absence de réglementation des nouveaux OGM en France et en Europe, ou le vote d’une nouvelle Politique agricole commune (PAC) qui favorise encore l’agriculture industrielle polluante. Le pouvoir des juges pour mettre fin à l’impunité des responsables est donc fondamental. Ainsi, malgré les manœuvres financières de Monsanto-Bayer pour échapper à la condamnation judiciaire, les récentes victoires définitives de Dewayne Johnson aux Etats-Unis et de Paul François en France sont porteuses d’espoir pour les millions d’autres victimes dans le monde.
Unir les luttes pour exiger la justice environnementale
Cette année, des procès et recours en justice historiques sont à l’avant-garde du combat pour la justice environnementale et contre l’agrochimie.
Victime franco-vietnamienne des épandages d’agent orange pendant la guerre du Vietnam, Tran To Nga a poursuivi en justice quatorze multinationales (Monsanto, Dow Chemical, Hercules, Uniroyal, etc.) ayant produit ou fourni l’herbicide, utilisé comme arme chimique par l’armée étatsunienne. Plus de 3 millions de victimes sur quatre générations n’ont à ce jour jamais obtenu justice ni réparations. La décision du procès de Tran To Nga a été rendue le 10 mai : ses demandes ont été jugées irrecevables sous prétexte qu’il n’est pas possible de juger les actions d’un Etat souverain. Une véritable honte ! Elle fera donc appel. En effet, ce sont ici les multinationales qui sont visées : pour avoir répondu volontairement à un appel d’offres et pour avoir choisi des méthodes de production augmentant la toxicité de l’agent orange. Nous demandons qu’elles reconnaissent leur responsabilité, et nous exigeons justice pour Tran To Nga !
La justice est aussi exigée par les victimes du chlordécone, un pesticide organochloré utilisé entre 1972 et 1993 en Guadeloupe et en Martinique. Alors que plus de 90 % de la population des deux régions insulaires en est contaminée, qu’on y retrouve les plus forts taux de cancers de la prostate au monde, que les sols, les ressources en eau et la biodiversité sont toxiques pour des centaines d’années à venir, le ministère public laisse entendre que les faits seraient prescrits. Le traitement colonial de cette affaire par l’Etat, qui va jusqu’à réprimer les militant·es, n’est plus à démontrer.
Enfin, une étude a récemment démontré que quatorze pesticides autorisés à la vente en Europe, et vendus comme «sans glyphosate» contiennent de l’arsenic, des métaux lourds et des dérivés du pétrole cancérogènes. Une fois encore, la dissimulation et la tromperie des industriels menacent la santé de tous ceux qui sont exposés à ces pesticides. Des recours ont été déposés pour éclairer la responsabilité de l’Etat, des multinationales et des agences sanitaires, dont les études de toxicité sont insuffisantes et les processus d’autorisation largement favorables aux lobbys industriels.
Promouvoir une agriculture écologique et autosuffisante pour tou·tes !
Ce monde d’empoisonnements et d’injustices n’est pas une fatalité. Nous pouvons construire un système agricole et alimentaire respectueux du vivant ainsi que de la santé de toutes et tous. Nous pouvons atteindre la souveraineté alimentaire pour tou·tes partout dans le monde. De nombreuses initiatives engagées et courageuses d’agriculteur·trices partout dans le monde entament déjà cette révolution.
Pour faire advenir un modèle agricole capable de nourrir l’humanité sans la détruire, une agriculture écologique est à généraliser, sans monoculture, sans OGM, sans engrais azotés ni pesticides de synthèse. Cela passera par une transformation radicale des politiques agricoles, et notamment de la PAC, et par la garantie de revenus justes pour tou·tes les paysan·nes.
Mais pour enfin obtenir un débat sérieux sur ces questions, il faut nous débarrasser du poids de l’industrie agrochimique et de ses lobbys, dont Monsanto-Bayer n’est que le symbole le plus visible.
Nous nous mobiliserons le 15 mai à Paris et dans plus de quinze villes avec le soutien de plus de 70 organisations de la société civile.
Soyons nombreux·ses pour faire entendre nos voix : demander justice et construire, ensemble, le début d’un monde débarrassé de ses toxiques.
L’organisation de la marche contre Monsanto et l’agrochimie 2021 : Combat Monsanto ; collectif Vietnam-Dioxine ; Comité de soutien à Tran To Nga ; Collectif Zéro chlordécone, zéro poison ; Notre affaire à tous ; CCFD-Terre solidaire ; Acides ; FAIR [e] un monde équitable ; Générations futures ; Il est encore temps ; les Ami.e.s de la Confédération paysanne ; MNLE ; Secrets toxiques ; Youth For Climate Paris ; Extinction Rebellion France ; Extinction Rebellion Paris.
Organisations signataires : Afape ; Alternatiba Nevers ; Amap IDF ; ANV-COP21 Nevers ; Association d’amitié franco-vietnamienne ; Association Dolor-Banidol pour la vérité sur la catastrophe aérienne du 3 décembre 1969 ; Association Vivre ; CADTM France ; Cergy-Pontoise Environnement ; Cointre ; Collectif asiatique antiraciste ; Collectif de défense des jardins ouvriers des Vertus d’Aubervilliers ; Collectif Paaf ; Collectif pour les terres de Gonesse (CPTG) ; Collectif Vérité et justice pour Lamine Dieng ; Collectif Vies volées ; Comité de solidarité internationale à Mumia Abu-Jamal et aux prisonniers politiques USA (Cosimapp) ; Coordination EAU Ile-de-France ; Décolonisons-nous ; Education Ethique animale ; FAIR [e] un monde équitable ; Fédération nationale d’agriculture biologique ; Ligue des droits de l’homme ; MIR (Mouvement international pour les réparations) ; Miramap ; Mobilization4Mumia ; Nous voulons des coquelicots Nevers ; Nasyon Matnik ; Observatoire Terre Monde ; Pollinis ; Prison Radio /Fondation Justice Redwood ; Ragster ; REV-Guadeloupe ; Résilience France ; Sillage ; Mouvement des jeunes pour la transition agroécologique et alimentaire ; SNCS ; FSU ; SOL, alternatives agroécologiques et solidaires ; SumOfUs ; le Studio jaune ; Union nationale apiculture française ; Unis pour le climat et la biodiversité ; Voix déterres ; Youth For Climate Paris.
Partis signataires : Europe Ecologie-les Verts ; Nouvelle Donne ; La France insoumise ; Parti communiste des ouvriers de France ; Pour une écologie populaire et sociale (Peps) ; Union communiste libertaire.
Personnalités signataires : Mumia Abu-Jamal journaliste, écrivain et militant afro-américain ; Manon Aubry eurodéputée La France insoumise et coprésidente du groupe de la Gauche au Parlement européen ; André Bouny écrivain initiateur du procès de Tran To Nga ; Martine Billard ancienne députée de Paris et coordinatrice du livret «Planification écologique» de La France insoumise ; Dominique Bourg philosophe ; Valérie Cabanes juriste internationaliste et essayiste ; Marine Calmet présidente de l’association Wild Legal ; Caroline Fiat députée La France insoumise ; Malcom Ferdinand chercheur au CNRS ; Joao Gabriel blogueur militant panafricaniste ; Anne Hessel militante Agir pour le climat, coprésidente d’honneur de Nouvelle Donne ; Michel Larive eurodéputée La France insoumise ; Annie Lahmer conseillère régionale EE-LV ; Pierre Larrouturou député européen Nouvelle donne, rapporteur général du budget 2021 ; Priscillia Ludosky militante pour la justice sociale et environnementale ; Philippe Marlière politiste ; Corinne Morel Darleux autrice ; Younous Omarjee eurodéputé La France insoumise ; Dilnur Reyhan présidente de l’Institut ouïghour d’Europe ; Mathilde Panot vice-présidente du groupe parlementaire La France insoumise et députée du Val-de-Marne ; Anne-Sophie Pelletier eurodéputée La France insoumise ; Loïc Prud’homme député La France insoumise ; Adrien Quatennens député La France insoumise, coordinateur du parti ; Muriel Ressiguier députée La France insoumise ; Marie-Monique Robin écrivaine et réalisatrice ; Ghislaine Senée conseillère régionale EE-LV ; Marie Toussaint eurodéputée écologiste.
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